Bon, on savait depuis quelques temps qu'on peut aimer les dispendieux sports mécaniques et prôner la rigueur budgétaire pour ceux qu'on dirige. En tous cas en termes de méthode, on ne peut pas dire que la souplesse et le dialogue avec les français soient une qualité de notre Premier Ministre. Ses dernières déclarations au caractère inflexible sont d'ailleurs là pour nous le rappeler :
- "Nous ne faiblirons pas, nous ferons l'ensemble des réformes"
- "Nous essaierons d'être le plus réceptifs possible aux critiques qui peuvent monter ici ou là, aux suggestions qui peuvent être faites mais en essayant de garder le sens de l'intérêt général"
- "C'est normal qu'il y ait des projets controversés, on est dans un pays qui a attendu très longtemps les réformes"
Est-ce au nom du sens de l'intérêt général qu'après avoir (comme vous l'a raconté Slovar) fait un geste pour la planète dans les jardins de Matignon, qu'il fait sa priorité du retour du crâne de René Descartes au Prytanee de la Flèche
Ou, assisterions nous à un acte de délocalisation des restes du défunt ? Cette délocalisation devant s'effectuer vers un endroit stratégique pour le Premier Ministre : La Flèche.
La Flèche, rappelons-le, qui est située dans la 3e circonscription de la Sarthe où François Fillon a été élu député de la 4e (Sablé, Le Mans-Ouest) L'affaire est tellement cruciale et plus importante que la crise économique et financière qu'une réunion de conseillers de plusieurs ministères doit décider le 13 janvier du sort de l'ossement.
J'en entends déjà qui disent : "qu'est ce que c'est encore que cette histoire" d'autres "il a vraiment rien d'autre à faire en ce moment" ou "mais on s'en f.... " Certes, mais le bon plaisir de notre Premier Ministre est en train de faire naître une polémique que nous ne qualifierons pas de cartésienne.
La proposition de transférer le crâne de Descartes au Prytanée militaire de La Flèche (Sarthe) s’annonce d’emblée controversée. Elle doit pourtant être examinée à Matignon le 13 janvier, lors d’une réunion interministérielle à la demande de François Fillon, qui avait évoqué ce transfert dans son fief électoral dès 1996, à l’occasion d’un colloque organisé à La Flèche pour le 400e anniversaire de la naissance du philosophe.
Où se trouve le crâne actuellement ?
Aux dernières nouvelles il est "pensionnaire" du Musée de l'Homme. Le responsable des collections se dit, lui, « consterné » par cette nouvelle qu’il a "découverte dans la presse, sans recevoir aucune demande officielle"
Il semble que l’idée ait été lancée par plusieurs universitaires : Geneviève Rodis-Lewis, auteur d’une biographie de Descartes, le professeur Pierre Lefebvre, ancien élève du Prytanée et membre de l’Académie de médecine, et le professeur Émile Aron, doyen de l’Institut de France », souligne Jean Petit, président de l’Association des amis de la bibliothèque du Prytanée, qui a écrit en novembre dernier à Matignon pour relancer cette proposition.
René Descartes a été formé au Prytanée, alors collège Henri-le-Grand, entre 1607 et 1615, il y a étudié de 1607 à 1615, soit de l'âge de 11 ans à 18 ans. Un moment essentiel, on n'en doute aucunement, dans la formation de l'illustre auteur du « Discours de la méthode », même si celui-ci y dénonce précisément la scolastique enseignée à l'université.« il y aurait une logique à ce que son crâne retrouve ainsi le lieu de formation de son esprit, estime-t-il. Le rayonnement de ce philosophe, qui note dans le Discours de la méthode : “J’étais dans une des plus célèbres écoles de l’Europe”, pourrait ainsi bénéficier au Prytanée et à toute la région », ajoute-t-il, souhaitant « profiter de la réorganisation en cours du Musée de l’homme ».
De 11 à 18 ans, que se passera t-il si la Hollande où il a passé une vingtaine d'années ou la Suède où il est mort en 1650 se mettent de la partie ? Irions nous jusqu'à la rupture diplomatique avec les Pays Bas et la Suède ?
Comme il faut une morale à ce "transfert" issue d'une promesse incontournable de 1996, il est intéressant de lire ce que déclare Philippe Mennecier le responsable des collections du Musée de l'Homme : "Pour Philippe Mennecier, ce crâne, après des pérégrinations rocambolesques, « a été donné en 1821 par le savant suédois Berzelius à Cuvier. C’est pour cela qu’il se trouve dans les collections publiques, où de nombreux savants sont venus l’examiner. Cette histoire a aussi sa logique. » Plus ennuyeux encore, souligne la journaliste Clémentine Portier-Kaltenbach, auteur d’Histoires d’os (Lattès), « on n’est même pas sûr de l’authenticité de ce crâne, car il existe au total cinq crânes attribués à Descartes. Il faudrait au minimum une expertise scientifique. Sans compter que le reste de sa dépouille est inhumé à l’église Saint-Germain-des-Prés à Paris !"
De plus, selon un légiste, cité par Rue 89, il existerait de fait cinq crânes potentiellement de Descartes, dont un à Stockholm et trois autres dans des collections privées
En clair : On est pas certain qu'il s'agit de son crâne et de surcroît, la livraison "en kit" poserait un problème de respect aux morts comme l'explique Clémentine Portier-Kaltenbach : « Nous serions collectivement responsables d’un outrage aux mânes de Descartes si nous prenions la décision de transférer son seul crâne, là où le respect dû aux morts impose au contraire de réunir l’intégralité de ses restes mortels », a-t-elle donc écrit à la ministre de la culture, le 19 décembre dernier.
Ce qui fait plaisir, dans cette affaire, c'est de voir avec quelle application nos élus et élites peuvent se mobiliser sur des sujets aussi "importants" alors que des milliers de chômeurs et de précaires supplémentaires se préparent à affronter la dureté de la crise économique. Oui mais que représentent quelques français pour qui la vie sera difficile à côté du rayonnement mondial de la circonscription de La Flèche ?
Français, vous êtes mesquins.
Sources et crédits
La Croix
La Nouvelle République
Le blog Auto
AFP
L'Express
Crédit et copyright photos
Le Blog Auto
Tribune de Genève
Libellés : fillon, gouvernance, humour, politique