Henri Bergson, édition critique sous la direction de Frédéric Worms,
éd. Puf, 522 p.
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Matière et mémoire est le deuxième livre publié par Bergson en 1896. On pourra dire en substance qu'il y a là la matière féconde de l'œuvre à venir. Jusque là tout est clair... Entrer dans la pensée d'Henri Bergson n'est en effet pas chose aisée pour le simple lecteur non averti (même si vous vous dîtes après tout que vous avez eu 10 en philo au bac...). Disons que la réflexion, dense, n'est pas aussi simple qu'une histoire d'amour à la Marc L. Jusque là encore tout est clair. Alors mettons donc les pieds dans le plat ou plutôt dans la matière...
Bergson veut retirer à notre mode de connaissance le masque encombrant de l'espace. Ce dernier nous voile en effet la réalité de l'esprit et de la matière mais aussi la relation entre ces deux ingrédients... Là évidemment tout devient nettement plus... profond. En fait, Bergson est un éclaireur moderne qui veut dépoussiérer quelques vieilles données de la métaphysique, notamment celle posées par le sacro-saint Descartes. Pour Bergson, le problème n'est pas spatial mais temporel : le corps est le lieu du présent tandis que l'âme est celui du passé où siègent les souvenirs. Le cerveau est ce lien primordial qui projette cette mémoire dans le présent. A ce propos, le philosophe distingue clairement deux formes de mémoire (rappelez-vous le, dorénavant !) : la mémoire habitude qui a l'automatisme de la récitation apprise pas cœur et la mémoire pure qui incarne le passé (Ah les beaux jours d'antan que l'on évoque en contemplant l'album souvenir !). Le passé se survit ainsi dans deux formes distinctes : « dans des mécanismes moteurs et dans des souvenirs indépendants ». Bergson nous révèle donc un peu de la formidable complexité de notre être qui est tout à la fois moteur et véhicule spirituel, matière et mémoire. Son œuvre clé dans l'histoire de la philosophie rapproche et résout ce dualisme qui fait le sel de notre humaine condition.