N’abuseraient-ils pas des couleurs ?

Depuis le temps que l’on se farcit un nombre exponentiellement croissant d’affiches, d’annonces et de tracts d’un certain parti politique, une évidence m’avait échappé : avec les Démocrates suisses, le parti qui a quitté le centre pour la droite xénophobe fait un usage des plus abondants du drapeau suisse.

Plus une seule campagne sans une utilisation plus ou moins détournée du drapeau suisse et depuis peu de la dénomination «qualité suisse».

Personnellement, je trouve qu’il y a de l’abus et que les armoiries de la Confédération n’ont pas à être monopolisées ou squattées, voire simplement utilisées, par un parti politique, quel qu’il soit.

Ce parti politique tente ainsi d’obtenir les faveurs de celles et ceux qui ont la fibre patriotique assez développée pour se laisser convaincre que le parti en question réunit en son sein toute la quintessence de la suissitude, voire qu’il représente, du moins symboliquement, officiellement «La Suisse». La pseudo-officialité de ce parti est gênante à plus d’un titre, mais elle est surtout gênante parce que ce parti ne représente pas la Suisse de tout le monde et en tout cas pas la mienne.

Le plus piquant dans cette affaire héraldique est que la conseillère nationale Jasmin Hutter, qui est justement députée de ce fameux parti qui abuse des couleurs suisses, est parfaitement sensible aux problèmes que pose l’usage abusif du drapeau suisse puisqu’elle est l’autrice d’un postulat dont la teneur est la suivante :

Protection de la marque suisse

Texte déposé : Le Conseil fédéral est chargé d’exposer au parlement de quelles manières la marque suisse pourrait être mieux protégée. Il faut en particulier vérifier en quelle mesure les lois et les ordonnances peuvent être révisées en ce sens.

Développement : Pour l’économie suisse, et en particulier pour le secteur de l’exportation, la protection de la marque suisse ou Made in Switzerland est essentielle. La bonne réputation de la production suisse - fiabilité, qualité, sérieux - contribue largement au succès de l’économie suisse. Cette réputation doit être protégée. La Confédération doit s’assurer qu’aucune entreprise étrangère ne profite de cette bonne réputation en prétendant que ses produits sont de fabrication helvétique. Les entreprises suisses déposent de plus en plus de plaintes à ce sujet.
Je charge le Conseil fédéral d’exposer la situation, les lacunes du droit suisse en la matière et les mesures pouvant être prises pour remédier à ce problème.

La réponse a été apportée dans un rapport du conseil fédéral intitulé Protection de la désignation « suisse » et de la croix suisse dont la conclusion 3 est la suivante :

prendre les mesures pour renforcer la protection de la désignation « suisse »/de la croix suisse en Suisse.

Madame Hutter, protéger la croix suisse et la qualité suisse, c’est bien, ne pas se l’approprier ce serait mieux. Touchez-en un mot à votre parti qui abuse d’une partie de notre patrimoine commun.