Subtil retournement de situation, épinglé par B. Chapon dans 20 minutes (22/11/2007). Il concerne le Great American Songbook : « cette liste officieuse des meilleures chansons (américaines) avait paradoxalement été créée pour barrer la route au rock’n’roll ». Si l’auteur apporte cette précision, l’adverbe « paradoxalement », c’est parce que les chanteurs estampillés « rock’n’roll » (ou autres étiquettes de la musique moderne) mettent souvent un point d’honneur à réinterpréter ces standards de la chanson. Or cette liste était censée, à sa création, endiguer le déferlement de ces musiques nouvelles, en fixant les grandes réussites du passé dans une liste de modèles « intouchables » ! Plus généralement, une tradition puise les forces de sa pérennité en réaction aux assauts portés par des adversaires. Figée dans un dogme inamovible, elle ne peut que s’étioler progressivement : la contestation sécrète une sève où se ressourcer, quand la chape de la pensée unique suscite au contraire une léthargie de Belle au Bois Dormant !