L'Angleterre victorienne dans toute sa splendeur: campagnes verdoyantes, plaisantes, cachant de sordides affaires. Une histoire d'amour contrariée par la différence de classe sociale des deux amoureux, un mariage arrangé et malheureux, une demi-soeur dévouée, pleine d'audace et d'une intelligence aiguë, des chateaux lugubres, un oncle souffreteux et égoïste....bref, on se croirait presque dans un roman de Jane Austen.
Walter Hartright est un jeune professeur de dessin qui va voir son destin basculé après avoir rencontré, un soir, une "dame en blanc", sur la route de Londres. Cette dernière fuit quelque chose, quelqu'un et n'écoutant que son coeur chevalesque, Walter l'aide à rejoindre la ville. Des propos étranges lâchés par la dame en blanc laisse apparaître qu'elle connaît le lieu où il va exercer son activité de professeur de dessin: Limmeridge et son manoir perdu dans la campagne brumeuse. Est-ce un hasard ou la main du destin? Toujours est-il que rien ne sera plus comme avant dans la vie de Walter Hartright: il entre dès lors dans une folle histoire qui le mènera au bord du précipice et de la douleur, balloté de la campagne anglaise aux forêts tropicales d'Amérique du Sud en passant par les ruelles sordides de Londres.
Comment parler de ce foisonnant roman victorien sans déflorer l'intrigue? Comment résumer ce qui est impossible à réduire? Une quadrature du cercle difficile à respecter mais sous peine d'être une pousse au crime, je me contenterai de parler de mes simples impressions.
Par où commencer? La ressemblance avec un roman austenien est très vite estompée par les multiples rebondissements des aventures et mésaventures de Walter, l'amoureux déçu mais toujours transi et aimé en secret, de Laura, la jeune héritière orpheline d'une beauté toute victorienne, de Marian, la soeur brune autant que Laura est blonde, vive autant que Laura est contemplative et fataliste, rebelle autant que Laura est soumise. Confronté aux dures réalités des usages victoriens, notre trio bataillera dur contre un lord désargenté, aigri par une menace mystérieuse émanant d'une certaine dame en blanc qui aurait le pouvoir de faire échec à l'échaffaudage machiavélique dont son union avec Laura est un des leviers. Si seulement, sir Percival Glyde était seul, la partie ne serait pas si compliquée (et le récit bien moins rebondissant et exaltant)! Or il est accompagné par un certain comte italien, Fosco, et son épouse anglaise (qui s'avère être la tante de Laura!), aussi étrange et excentrique que subtilement dangereux et doucereusement diabolique.
Les ingrédients sont réunis pour que s'organise un récit où les actions sont plus incroyables les unes que les autres, où les rebondissements inattendus s'enchaînent à une vitesse haletante, où les sournoiseries, les trahisons, les mensonges sont les plus douloureux et plus noirs possibles! Une avalanche de révélations, l'intervention, tel un deus ex machina théâtral, d'une organisation secrète internationale, pimentent allègrement le tout, surprennent le lecteur et le laissent dans un état de béatitude délicieux devant le sort réservé aux traîtres et aux méchants!
Plus d'une fois, le souvenir d'un roman de cape et d'épée de Monsieur Achard, "Les coups d'épée de Monsieur de La Guerche", est venu assaillir ma lecture et amplifier le bonheur de dévorer le thriller victorien de W.Wilkie Collins!
"La dame en blanc" fut une lecture où la jubilation est toujours présente devant la langue recherchée du XIXè, les tournures stylistiques léchée et belles à lire et à savourer. Une belle découverte qui inaugure en beauté cette nouvelle année de lecture!
Roman traduit de l'anglais (GB) par L.Lenob