Ilyes, 3 ans, hospitalisé pour une angine, est mort mercredi soir à l'hôpital parisien Saint-Vincent de Paul (XIVe), une infirmière lui ayant administré par erreur du chlorure de magnésium au lieu de vitamines.
Une information judiciaire pour "homicide involontaire" a été ouverte vendredi à l'encontre de cette femme de 35 ans, dont onze de pratique de son métier. Placée en garde à vue, elle a été relâchée sous contrôle judiciaire, avec interdiction provisoire d'exercer son métier. Fait divers regrettable mais isolé ou symptôme d'un hôpital malade? Le débat fait rage sur le web.
Interviewé par le Parisien vendredi, le père d'Ilyes, Ihmad, crie sa douleur et sa colère contre l'institution:
"J'ai vu qu'il était en train de mourir. [...] J'ai appelé au secours mais il n'y avait personne dans le couloir. Ma femme criait. [...] Les soignants m'ont dit qu'il n'avait rien.
"C'est moi qui ai entrepris de lui faire du bouche-à-bouche, puis des massages cardiaques. Quand j'ai prévenu l'infirmière, elle m'a dit sur un ton sec de la laisser travailler. [...] Quand ils ont compris que c'était grave, ça a été la panique. J'ai attendu un quart d'heure avant qu'ils ne reviennent le réanimer. [...] Et lorsque les médecins sont arrivés, ils m'ont dit de les laisser travailler.
"Dans un hôpital du tiers-monde, on l'aurait sauvé. Je veux juste la vérité pour que cela ne se reproduise plus jamais."
"La faute est, évidemment, collective"
Dans un commentaire sur le blog de l'avocat Maître Eolas, la pharmacienne blogueuse Lumière Noire apporte son soutien à la famille. Et n'hésite pas à lâcher cette petite phrase lourde de sous-entendus et extrêmement commentée depuis sur le web:
Tout en rappelant qu'il existe sûrement des circonstances atténuantes (empressement, débordement, négligence), la pharmacienne met également en cause l'ensemble de l'équipe soignante, qui a mis du temps à secourir l'enfant:
Sur son blog, l'Hérétique met également en cause l'ensemble du monde hospitalier:
Samedi matin, dans les journaux, de nombreux éditorialistes dénonçaient également la seule sanction de l'infirmière. Ainsi, Matthieu Verrier dans "la Voix du Nord", s'interrogeait:
D'un point de vue juridique, Gilles Devers, avocat au barreau de Lyon, regrette lui aussi cette garde à vue trop hâtive:
"Roseline Bachelot (qui avait qualifié la garde à vue de l'infirmière de 'normale', ndlr) a parlé trop vite."
Et d'estimer que, pour le moment, on ne peut pas condamner une infirmière au pénal pour une erreur:
Patrick Pelloux demande la démission de Bachelot
Sa conclusion: ne dramatisons pas l'affaire, comme le fait Patrick Pelloux (président du syndicat de médecins urgentistes, Amuf) qui a demandé dès jeudi sur France Info la démission de Roseline Bachelot.
Même critique de Patrick Pelloux chez Philippe (Sully) Robert:
Pierre Fréhel, du "Républicain Lorrain" finit de l'achever:
"Demain, ce type d'affaire ira en grandissant"
Ce fait divers relance en tout cas le débat politique autour de l'hôpital public. Mireille Le Corre, secrétaire nationale du Parti socialiste chargée de la santé, a publié hier un communiqué sur son site, dénonçant la saturation des services au moment des fêtes de fin d'année:
Le milieu infirmier réagit également: sur le blog fecalome.net, on dénonce le fait que "cette petite victime montre le naufrage de notre métier": manque d'effectif, obligation administrative grandissante, conditions de travail médiocre...
Autre témoignage, sur Rue89 cette fois, Marina, infirmière, confie ses doutes: