Le futur logo du Top 12 ?
Le président de l’ASM Clermont Auvergne, René Fontès, avait déjà lancé le pavé dans la mare en début de saison, aujourd’hui il est relayé par deux personnes influentes du rugby professionnel français : Marc Lièvremont, entraineur du Quinze de France, et Guy Novès, son homologue du Stade Toulousain : Tous trois veulent un Top 12. Probablement que les raisons qui les ont poussées à se prononcer sont différentes, cependant Marc Lièvremont et Guy Novès ne sont pas des politiciens du rugby, ce sont des hommes de terrain. Une raison supplémentaire pour les écouter :
Le premier des avantages d’un passage de 14 à 12 clubs est bien évidemment le gain de temps consacré au repos, nécessaire à tout sportif (surtout quand celui-ci pratique un sport de combat). En effet avec un Top 12, nous économiserions quatre journées de championnat (2 matchs « aller » ainsi que 2 « retour »), soit presqu’un mois dédié au repos et à la préparation. Ce ne serait pas un luxe, c’est probablement un minimum. Pierre-Yves Revol qui pour l’instant ne souhaite pas un passage à un Top 14 n’y est pas favorable, mais au moment où il faudra négocier au sujet de l’uniformisation des calendrier, beaucoup risquent de faire remarquer à notre nouveau président de la Ligue qu’avec une élite à quatorze clubs, alors qu’à titre de référence les Anglais ont une élite réduite à 10 clubs bien que possédant une fédération plus importante en nombre de licenciés, la France n’est pas en mesure d’imposer quoi que ce soit à qui que ce soit et doit avant tout balayé devant sa porte. Or, pour réduire le nombre de journées dans le calendrier il n’y a pas cinquante milles solutions : Je n’en vois que trois, réduire le nombre d’équipes dans le championnat, en revenir à un système de poule, ou faire jouer notre compétition locale sur le modèle du Super 14, en matchs « aller » uniquement. L’autre grand argument des pro Top 12 et que cela concentrerait les meilleurs joueurs dans douze clubs au lieu de quatorze, et nivelerait donc le championnat par le haut : Les joueurs ayant joué en Premiership, le championnat anglais, avancent souvent que de l’autre côté de la Manche il n’existe pas d’impasse, ces journées où les entraineurs font le choix de ne pas jouer leur carte à 100 % en se concentrant sur un objectif ultérieur. Du coup en Angleterre, tous les matchs deviennent importants et le terme « petite équipe » n’existe pas. Le championnat anglais est donc nivelé par le haut.
Cependant tout le monde n’est pas d’accord car le passage d’un Top 14 à un Top 12, nest pas sans risque.
Je passerai sur le fait que grand nombre d’équipe du ventre mou du Top 14 ne voudront pas d’un Top 12 qui compromettrait très sérieusement leur vie dans l’élite, car il s’agit là plus de raisons affectives que d’une véritable réflexion sur les réels besoins du rugby français. Un passage à un Top 12 réduirait considérablement notre réservoir de joueurs pour l’étage supérieur, c’est-à-dire pour le Quinze de France. On peut alors se demander pourquoi Marc Lièvremont s’est prononcé pour le passage d’une élite plus réduite des clubs ? C’est bien simple, si la profondeur du réservoir de joueur est une chose, la qualité du réservoir en est une autre et dans la démarche de l’entraineur national, un Top 12 produirait de meilleurs joueurs. Ce problème de réservoir de joueurs et d’autant plus fort que notre championnat ressemble de plus en plus à une publicité pour Benetton, le taux de joueurs non-sélectionnables (et je ne parle pas ici d’étrangers) pour le Quinze de France y est vraiment très importants. Nous sommes dans une phase de mondialisation, et cela est dans l’ère du temps me diriez-vous. Je serais tenté de vous répondre par l’affirmative. Seulement il y a un « hic » de taille : Tous les pays producteurs de joueurs ne jouent pas le jeu, si jose dire. Seul l’Angleterre et la France sont dans cette optique très libérale. Les autres sont beaucoup plus conservateurs notamment les nations sudistes. En quinze ans de professionalisme, seuls deux rugbymen français, Christian Califano à Auckland et Fred Michalak au Natal, sont partis joué dans l’Hémisphère Sud, autant dire que c’est très peu, quand on voit les légions entières de joueurs sudistes débarquer sur nos belles plages. Je suis le premier à me réjouir quand je vois un Dan Carter, ou un Sonny Bill Williams rejoindre le Top 14. Je préfère encore cela que de voir un Top 14 deserté par nos meilleurs joueurs, comme c’est le cas de nos tristes championnats de foot, de basket, de hand et de pratiquement tous les autres sports d’équipes. À chaque fois qu’un international australien, néo-zélandais ou sud-africains vient jouer en France, c’est une place pour le rugby de haut niveau qui se libère pour un espoir chez eux, et c’est une place en moins pour un espoir français d’atteindre le rugby de haut-niveau. Après il ne faut pas s’étonner que les nations du sud aient un réservoir plus profond que le nôtre ! Sans parler des Argentins et des Îliens qui n’ont même pas de championnats professionnels. La situation serait forcément pire avec un Top 12, il serait dangereux de réduire l’élite du rugby français, si du côté des sudistes on continue à jouer la carte du conservatisme. C’est pourquoi j’avais opté pour un championnat franchisé à 18 clubs. J’ai déjà abordé le thème en long, en large et en travers, alors je ne vais pas revenir dessus. Autre argument de taille pour les anti Top 12, la consanguinité qui menace notre championnat. À l’heure où le rugby est en passe, pour la première fois de son histoire, de devenir un grand sport international, où le nombre de pratiquants est en train de se décupler, où on parle d’olympisme et de Coupe du Monde en Russie et au Japon, la France, qui n’en est plus à un paradoxe près, serait sur le point de refermer son élite en un championnat du Sud-Ouest !
Le rugby a besoin d’oxygène, dans 10 ans nous aurons soit un championnat comparable à celui de la Ligue 1 de football en terme de popularité, soit un championnat comme ceux de basket, de hand et de volley complètement incapable d’attirer les investisseurs et les foules. Le rugby hexagonale se trouve exactement aujourd’hui à la croisée des chemins, à lui de savoir où il veut aller. Il y a une quinzaine d’année, le basket français n’a pas su prendre le virage pris par les championnats espagnol, grec, italien, russe et turc qui aujourd’hui jouent devant un public toujours nombreux. Il est même probable que le basket-ball tricolore ait laissé une voie royale au rugby en agissant de la sorte.
Trente-six, vingt, seize, douze, l’élite du rugby français n’a cessé de se réduire. Mais jamais cela n’a vraiment porté ses fruits. La réduction à douze clubs n’est pas négative en soit. Elle serait même probablement globalement postive, à une seule et unique condition, celle d’avoir pensé au préalable au fond du problème : Quel rugby veut-on ? Comment imaginer une formule capable de hisser notre rugby sur le toit du monde ? Quel statut pour nos clubs ? Quel avenir pour nos rugbymen professionnels ? En essayant de répondre à ces questions, j’ai fait des propositions qui ont été critiquées de manières très fortes sur divers forums.
Les problèmes du calendrier international, ne dépendra pas que de nous, et avant de savoir ce que les autres peuvent faire pour nous (en général pas grand chose), il est meilleur de savoir ce que nous pouvons faire pour nous même, telle à toujours été ma devise. Il est temps de ne plus penser en Montferrandais, Parisiens, Montalbanais ou Perpignanais, mais de penser en Français. Personnellement, je ne suis pas défavorable à la création d’un Top 12, la seule chose que je demande c’est qu’au préalable tout le monde se mette autour d’une table, joueurs, entraineurs, représentants du rugby amateur, représentants des clubs professionnels, partenaires privés et publiques, chaines de télévisions, journalistes et qu’on se mette d’accord autour d’un grand projet. Ça sera mon voeux pour la nouvelle année. Que les Dieux du Stades m’entendent…