Insensiblement, les mots "immigrant" ou "immigré"ont tendance à disparaître de l'usage médiatique et politique pour être remplacés par celui de "migrant". Tout glissement sémantique a un sens. L'immigré était encore celui qui partait de quelque part pour aller s'établir quelque part. L'immigré était un homme qui quittait son pays, sa patrie pour son rendre dans un autre pays et en faire tant bien que mal sa nouvelle patrie. L’immigré était un sédentaire, étant étendu qu'il n'émigrait dans la grande majorité des cas qu'une seule fois dans sa vie.
Le migrant, c'est autre chose. Ce n'est plus un sédentaire, mais un nomade, venant de nulle part, n'étant nulle part chez lui et n'allant que vers un autre nulle part. Le migrant ne fait que migrer, il n'a aucune patrie, c'est un déraciné perpétuel, un homme en fuite.
Ce glissement sémantique révèle donc le mensonge qu'est tout discours sur l'intégration. Dans le système idéologique que nous subissons qui est basé sur la liquidation de tout ce qui fait l'identité d'un individu (patrie, famille, religion, nation) il ne peut être question d'intégrer qui que ce soit vu que le principe de ce système est la désintégration. Certes, il y a encore des autochtones et des immigrés mais à terme le projet démocratique est de faire de tout le monde un migrant, un être sans racine et sans histoire, flexible et corvéable à merci.
Pour l'instant, la seule différence entre immigrés et autochtones dans la société occidentale moderne est que les premiers ont encore le droit de se réclamer d'une culture ou d'une nation ce qui est interdit aux seconds. Cela risque de ne pas durer. D'ailleurs la hargne que mettent certaines communautés immigrées à défendre leur identité montre bien qu'ils ont une vague conscience, comme nous, de leur disparition programmée.