La colonne du diable : 1

Publié le 30 décembre 2008 par Porky

(Conte Pragois)

Autrefois, habitait dans les faubourgs de Prague un pauvre homme qui arrivait tout juste à se nourrir. Lorsque l’hiver arriva, il fut si rigoureux que cet homme n’avait même plus de quoi se chauffer. Il partit donc en forêt ramasser un peu de bois.

Tout en travaillant, il songeait avec désespoir à son retour. Certes, le foyer serait chauffé mais il n’avait plus d’argent pour acheter ne serait-ce qu’un morceau de pain. Et de plus, sa femme attendait un enfant.

Il ramassait son bois, en proie à ces tristes pensées, lorsqu’il entendit une voix derrière lui. Il se retourna et vit un homme, bien habillé, et qui tenait un fusil à la main. Le pauvre homme eut d’abord très peur, puis il se rendit vite compte que le nouveau venu n’avait aucune mauvaise idée derrière la tête, et même, avait une physionomie suffisamment avenante pour qu’on pût engager la conversation avec lui. Ce que fit notre homme qui conta à l’inconnu ses déboires.

Ce dernier resta un moment silencieux, puis il tendit la main vers son interlocuteur : « Je peux t’aider, dit-il. Tu deviendras riche et même plus riche que tu ne peux l’imaginer. » Et comme on le regardait d’un air soudain méfiant, il ajouta : « Tu ne me crois pas ? Tu as tort. Rentre chez toi, et tu verras que ton sort commencera à s’améliorer. Je ne te demande qu’une chose en retour : tu me donneras ce que ta femme tiendra dans ses mains lorsque tu pénétreras chez toi. » Puis il sortit de sa poche un parchemin et le tendit au pauvre homme, qui le signa de son sang sans hésiter.

L’inconnu tourna les talons et s’éloigna dans la forêt. L’homme posa sur ses épaules son fagot de bois et se hâta de revenir vers sa maison. Il regrettait presque d’avoir signé ce parchemin. Mais l’inconnu avait si bonne mine que ce pouvait être quelqu’un de maléfique, au contraire. Certainement, il avait eu affaire à un sorcier bienfaisant. L’idée qu’il avait pu croiser le diable en personne et signer un pacte avec lui ne lui effleura même pas l’esprit.

Quand il ouvrit la porte, il eut un mouvement de recul, puis se figea, pétrifié d’épouvante : sa femme, assise sur une chaise, le regardait en souriant. Dans ses bras, elle tenait leur enfant nouveau-né.

(A suivre)