Voilà le décor est planté et tout le reste du roman nous décrira le quotidien glacial de ces hommes dans lequel intervient (mais est-on dans la réalité ? Ou est-ce un fantasme né de la privation de nourriture et du froid extrême ? Du saturnisme ???) une bête qui (comme si cela ne suffisait pas ...) décime les survivants. Beaucoup de compte-rendus sur internet insiste sur cet aspect du livre et parle d'horreur (de fait, Simmons a bien intitulé son livre Terror) mais on serait dans l'erreur en croyant que nous sommes dans un roman du style Stephen King. Ici ce qui fait l'horreur c'est la lente descente aux enfers, décrite minutieusement par l'auteur avec un luxe de détails. On sait très bien comment l'histoire va finir, on sait que les hommes vont tout faire pour garder jusqqu'au bout une part d'humanité (admirable au passage sont les pages où l'on voit le capitaine Crozier se plier au rite de la cérémonie religieuse en lisant une page du Léviathan de Hobbes dont on connaît le pessimisme sur la nature humaine) et résister au cannibalisme mais on lit, fasciné, par cette histoire pourtant prévisible de A à Z (ou presque).
Terreur est bien écrit et traduit. Le lecteur est invité à être plus intelligent qu'il n'est (le signe des bons livres) et à se familiariser avec le langage de la marine et du monde arctique si ce n'est pas le cas (prévoir un dictionnaire pas trop loin de soi au début ). Il achèvera sa lecture en se disant qu'un de ces quatre, ce serait bien qu'il lise Tragédies polaires de Pierre Vernay comme lui conseille le traducteur (deux mini bibliographies achèvent le livre, une de l'auteur et une autre du traducteur - une attention franchement bienvenue pour le lecteur qui a envie d'en savoir plus). A une époque où l'on parle de fonte des glaces et de domaines exploitables, il est bon d'aller à contre courant et de se rappeler à quel point l'arctique est une terre inhospitalière (avec ou sans créature blanche !).