Rappelons-le, la mondialisation financière s’est installée à partir du consensus de Washington, au début des années 80, principalement sous la pression de M. Reagan et Mme Thatcher.
Une de ses caractéristiques tient, comme le disait René Passet (“Rationalité et cohérence d’une mondialisation à finalité humaine“), aux «3 D»: dérèglementation de tous les obstacles à la libre circulation des capitaux, désintermédiation, permettant aux entreprises et aux états de s’adresser directement au marché financier sans la médiation des banques et décloisonnement: l’ouverture des frontières et la réduction des barrières entre les marchés financiers et budgétaires.
Dès lors, le marché qui accompagnait traditionnellement la démocratie, change de nature et devient son ennemi. En effet, théoriquement du moins, la démocratie a pour objectif la promotion et la défense des intérêts de tous les habitants du territoire qu’elle représente et oblige à des politiques de redistribution au bénéfice des majorités électorale constituées par les moins favorisés. Alors que le marché mondialisé investit là où les monnaies, les taux d’intérêts, règlementations et les fiscalités sont les plus favorables au capitaux. La démocratie a besoindes frontières que le marché détruit. Cela oblige les gouvernements à passer au dessus des exigences de leurs mandants et à se conformer aux exigences du marché et de ses représentants locaux, la minorité des plus riches. Cela se ressent ans ce que les spécialistes relèvent, depuis plusieurs années, comme “l’impuissance du politique”.
Ne croyez surtout pas que ces thèses sur l’opposition devenant irréductible entre le marché mondialisé et la démocratie soient l’oeuvre de dangereux idéologues de l’ultra-gauche comme dirait MAM. On les trouve, détaillées, en toutes lettres dans un livre de Jacques Attali datant de 1999 (“Fraternités”, Fayard, 99, p. 47).
Les politiques de redistribution, réclamées démocratiquement par la plus grande part de la population, permettent d’atténuer les inégalités entre les personnes et les territoires, et outre les différentes dispositifs de sécurité ( réelle, du travail, santé, retraites, …), se traduisent en différents services publics (monnaie, transports, énergie, éducation, …).
L’histoire récente nous montre que ce sont ces dispositifs et services qui sont les premiers confisqués, restreints ou mis en pièces dès que, localement, les minorités les plus riches arrivent au pouvoir.
Les banques centrales échappent maintenant totalement aux régulations démocratiques, au service des capitaux; les départements riches refusent toutes péréquation au bénéfice des plus pauvres (ce qui fait échouer toutes les tentatives d’arriver, notamment, à un « Grand Paris »). L’Europe oblige aux dé-nationalisations (énergie, transports,) et à faire jouer la « concurrence libre et non faussée » jusque dans les services, en attendant de pouvoir le faire pour l’éducation, la santé et toutes les assurances (sociales, retraites, etc…). Toutes les règlementations issues du Pacte National de la Résistance sont, avec opiniâtreté, mises en pièces, y compris, en priorité, le droit du travail, …
Et ne revenons pas sur ce triste épisode démocratique qui a vu l’escamotage du vote “non” au référendum constitionnel européen.
Parallèlement, en presque 30 ans, la part des salaires dans la valeur ajoutée des entreprises a baissé de près de 10 points, au bénéfice des rentiers et actionnaires. Toutes les études, y compris celles de l’OCDE montrent que les inégalités ont augmenté dans tous les pays développés. La précarité devient la règle, et il faut démanteler toutes les niches (notamment celles des fonctionnaires et assimilés) garantissant des emplois stables.
Cette explosion des inégalités a vécu jusqu’à une période récente, afin de rendre supportable les baisses de niveau de vie, sur une explosion du crédit, renforçant de fait encore les précarités. Hélas, même cette période-là est définitivement terminée avec l’actuelle crise financière.
Les dettes publiques, qui se sont accrues au bénéfice quasi-exclusif des possédants, ont fortement augmenté dans la plupart des pays développés, reportant sur les générations futures les austérités inéluctables qui appelleront des mécanismes « démocratiques » encore plus biaisés.
Je vous proposerai, demain, de voir comment la « démocratie » s’est adaptée à cette capitulation.
- Cartographies, comment utiliser au mieux les données publiques? Sur Internet Actu.
- L’article le plus complet que j’ai trouvé sur l’affaire Madoff, sur Le Temps (Suisse).