86ème semaine de Sarkofrance: l'abécédaire des promesses non tenues par Sarkozy

Publié le 27 décembre 2008 par Juan
Il est temps, en ces derniers jours de décembre, de dresser le bilan des promesses non tenues du président Sarkozy. 2008 fut sa première année entière d'exercice présidentiel.  Une année agitée mais maussade pour le Monarque : désastre des élections municipales, tensions internationales, remontée du chômage, présidence européenne sur fonds de crise mondiale. Les sujets n'ont pas manqué pour justifier le volontarisme du Monarque. Mais le divorce entre Sarkozy et les Français semble consommé : au-delà de ses agapes amoureuses et dérapages Bling Bling, Nicolas Sarkozy paye d'avoir trahi certaines promesses.
L'intégralité de son programme ne pouvait évidemment pas s'accomplir en 86 semaines de présidence.
La critique vise ailleurs. Sur certains sujets, il nous avait promis des résultats rapides. Jugeons-le aux actes.  La liste qui suit est une première revue, non exhaustive, des engagements non tenus mais qui auraient dû l'être, un abécédaire des échecs de l'année qui devrait troubler l'électeur du 6 mai.
Allocations Familiales
"J’aiderai les familles à chacune des étapes de leur existence. En particulier, j’allouerai des allocations familiales dès le premier enfant." promettait Sarkozy dans son "projet" électoral. En avril dernier, on apprenait que que les bonifications accordées pour les adolescents ne seraient plus versées dès les 11 ans, mais après 14 ans. Tout ça pour économiser 138 millions d'euros sur le dos de 4,5 millions de familles.
BanlieuesFadela Amara était l'une des "prises" politiques de Nicolas Sarkozy en mai 2007. Elle incarnait aussi un espoir de rénovation et de réhabilitation des banlieues : site web participatif, déclarations tonitruantes sur le "plan anti-glandouille" en août 2007, puis annonce d'un plan "Banlieues Espoirs" en février 2008 soit-disant doté d'un milliard d'euros ! La promesse d'un contrat de travail unique sensé simplifier les embauches en banlieues est vite oubliée. Le plan Amara regroupe des dépenses gérées par d'autres ministères. Dix mois plus tard, le 17 décembre dernier, Nicolas Sarkozy reconnait que le plan est un échec.
ChômageSarkozy avait promis de réduire le nombre de chômeurs. Effectivement, les statistiques lui donnèrent raison. Et pour cause ! Après avoir fait voter la dégradation des indemnités chômage pour les sans-emplois qui refuseraient plus de "deux offres raisonnables", il a ignoré les travailleurs précaires. Dès avril 2008, l'intérim s'effondre. "Heureusement" pour lui, la crise mondiale lui donne un prétexte sur mesure pour masquer son échec.
CroissanceSarkozy devait aller chercher "avec les dents" un point de croissance du PIB supplémentaire. On lui reprochera d'avoir négligé le contexte international. L'éclatement des subprimes américains date de ... l'été 2007. Dès septembre, Bruxelles, l'INSEE ou l'OCDE contredisaient les prévisions gouvernementales. Dès le second trimestre 2008, la production industrielle baissait. Le 29 mars dernier, nous écrivions : "Sarkozy voulait la rupture, il aura la crise mondiale."
Déficits publics"La maîtrise de nos finances publiques est un impératif moral autant que financier. Les jeunes générations ne peuvent accepter que les générations actuelles vivent à leur crédit" dixit le candidat Sarkozy. Avant même le déclenchement de la crise mondiale au second semestre, les déficits publics s'envolent et la promesse d'équilibre budgétaire en 2012 devient obsolète. La défiscalisation des heures supplémentaires aggrave les comptes de l'Etat, de la Sécurité Sociale et des retraites : 615 millions d'euros pour le seul dernier trimestre 2007 dans les comptes de la Sécu ! Dès mars dernier, Fillon suspend la promesse de réduire de 68 milliards d'euros pendant la mandature les prélèvements obligatoires. Le 4 avril, Sarko annonçait 166 "mesurettes" pour économiser 7 milliards d'euros. On les a déjà oubliées ! Pour 2009, le seul déficit budgétaire de l'Etat est prévu à 80 milliards d'euros par le gouvernement.
Droits de l'Homme
Lors de son discours de vainqueur, au soir du 6 mai, Nicolas Sarkozy fut lyrique. En matière de droits de l'homme, on allait voir ce qu'on allait voir; 19 mois plus tard, le mensonge est patent: la France s'est réconciliée (si tant est qu'elle fusse fâchée) avec la quasi-totalité des dictatures du monde, pour reprendre un fructueux dialogue ... commercial ! Syrie, Russie, Chine, Tunisie, etc, qui n'a pas sa centrale nucléaire ou ses avions Dassault ? La Françafrique continue. Même Bernard Kouchner a fait son mea culpa: un secrétariat d'Etat aux Droits de l'Homme ne sert à rien selon lui. Les droits de l'homme sont bel et bien oubliés. 
Environnement
Sarkozy et Borloo s'étaient gargarisés de plaisir avec la tenue, jusqu'en octobre 2007, de leur Grenelle de l'Environnement. A l'exception du moratoire contre la culture d'un maïs transgénique (obtenu grâce à une grève de la faim) et du malus-bonus écolo pour l'acquisition de voitures, a fallu attendre un an pour faire voter la "première loi Grenelle", un catalogue de bonnes intentions dont le financement fut reporté à l'examen d'une seconde loi début 2009. Lors du dernier Conseil Européen, son président, le même Sarkozy, est parvenu à un compromis minable sur l'engagement européen à l'horizon 2020: à peine 4% de réduction des émissions carbone sur son territoire. La belle affaire !
Franchises médicales

En janvier 2007, Sarkozy promettait la lune. Rappelez-vous: "Je ne pense pas qu’il y ait matière à beaucoup d’économies dans la santé. Compte tenu de l’allongement de la durée de la vie, du progrès médical et de l’aspiration bien naturelle de nos concitoyens à vivre en bonne santé, l’investissement dans la santé sera forcément majeur." Le 1er janvier dernier entraient en vigueur ... de nouvelles franchises médicales pour économiser quelques 650 milliobs d'euros par an sur le dos des malades.
Gouvernement resserré
Le décompte réel des effectifs du gouvernement révèle qu'il n'est pas si resserré que promis par le candidat. Entre septembre 2007 et juillet 2008, selon l'annexe au projet de loi de finances pour 2009, les affectations dans les cabinets ministériels ont crû de 397 personnes et le montant des primes distribuées a progressé de près de 5 millions d'euros.
Immigration
En 2008, Brice Hortefeux peu se targuer d'un succès : au prix de quelques compromis, il fait adopter un pacte européen interdisant les régularisations massives. Mais derrière cet arbre, se cache une forêt d'illusions : l'immigration, thème majeur de Sarkozy en campagne, était (et reste) une diversion : sous couvert de quelques nominations au gouvernement (Rachida Dati, Rama Yade et Fadela Amara) Sarkozy s'est permis ce que jamais la France n'a connu depuis la France de Vichy: création d'un ministère de l'Identité Nationale, regroupement familial durci jusqu'aux tests ADN, tests de Français, quotas ethniques par métier, rafles et traques jusque dans les écoles, industrialisation de la rétention, et ... tribunaux pour étrangers. Rachida Dati a même dû préparer une modification constitutionnelle, et créer une commission ad hoc, pour faire passer ce changement de régime. Si l'on retire les expulsions à Mayotte (17 000 par an), le nombre d'éloignements dépasse péniblement les 10 000 cette année encore. Tout ça pour ça !
Immobilier
Favoriser l'accession à la propriété était l'une des priorités de Sarkozy. Le président nous vantait même les vertus du crédit hypothécaire ! Les mesures de soutien furent votées en 2007. Un an plus tard, on mesure combien le projet était anachronique. La crise des subprimes a éclaté à l'été 2007. La bulle immobilière en France était prête à exploser. De janvier à juin 2008, les crédits immobiliers ont chuté de 11%. La défiscalisation des intérêts d'emprunts n'a servi à rien. Les faillites boursières et le resserrement général du crédit ont achevé les ambitions présidentielles.
Police de proximitéNicolas Sarkozy aurait du avaler son chapeau. Michèle Alliot-Marie a créé en janvier 2008 des "unités territoriales de quartier", histoire de faire oublier les déclarations de campagne ("La police de proximité mise en oeuvre par M. Jospin a abouti à ce que, pour la première fois dans l’histoire de France, on a dépassé les 4 millions de crimes et délits").
Pouvoir d'achat
Cf "Travailler plus pour gagner plus."
PrisonsLa rénovation des prisons et des conditions de détention est l'un des grands échecs de la présidence Sarkozy à ce jour. Sa promesse de campagne était pourtant claire : "Je suis également partisan d'une grande loi pénitentiaire permettant à notre démocratie de définir ce qu'elle attend de ses prisons et de se donner les moyens de sa politique dans ce domaine." Depuis, les records de surpopulation sont dépassés de mois en mois. Le 28 juillet, Rachida Dati présentait quelques mesurettes.
Protection des sources des journalistesBel effet de communication, en mars dernier. Rachida Dati a fait voter une loi. Mais son texte officialise en fait les exceptions à cette protection des sources, qui sont "à titre exceptionnel et à condition que la nature et la particulière gravité du crime ou du délit et les nécessités des investigations le justifient" comme le terrorisme par exemple...
République irréprochableSarkozy nous l'avait promis. Mais 2008 fut l'année de tous les excès : augmentation du traitement présidentiel de 173% en janvier 2008, nouvel avion, dérapage des frais de la Présidence, multiplication des déplacements d'ordre privé, légions d'honneur de complaisance, nomination des patrons de l'audiovisuel, grâce présidentielle pour Marchiani ou Tapie. Tout y est.
Retraites
Contrairement à ce qu'on nous raconte, la "grande" réforme des retraites n'a pas eu lieu. En fait, le gouvernement Sarkozy n'a fait que dégrader le régime par petites touches: suppression des pré-retraites de 57 à 60 ans, revalorisation a minima des pensions ( moins que l'inflation en 2008), allongement à 41 ans de la durée de cotisation retraite passera mécaniquement à 41 ans, en application... de la loi Fillon de 2003.
Le véritable impact de Sarkozy sur les retraites fut la loi TEPA : la défiscalisation des intérêts d'emprunts immobiliers, et des heures supplémentaires (pour ne citer que les deux plus importantes) creusent le déficit des caisses des retraites de quelques 2,5 milliards d'euros par an...
Sans-abrisC'était l'un des engagements les plus démagogiques du candidat: le 18 décembre 2006, il promettait de supprimer tous les ans-abris dans les deux ans. Le 18 décembre dernier, il y avait (évidemment) encore pas mal de sans-abris en France. Près de 350 d'entre eux sont même morts de froid cette année. Le 29 janvier dernier, à quelques semaines de la fin de l'hiver, Fillon avait fait un geste, un plan pluri-annuel pour prévenir les expulsions locatives et un programme de "réhabilitation des centres d'hébergement et d'augmentation des capacités." Comme un bégaiement de l'histoire, Sarkozy répéta quasiment mot pour mot les mêmes promesses en décembre...
Seniors
"Je mets d’ailleurs les entreprises devant leurs responsabilités. On doit garder les quinquagénaires dans les entreprises" nous expliquait le candidat de la droite en 2007. On croyait qu'il allait agir sur les employeurs. Quel malentendu ! En mai dernier, les (futurs) retraités ont eu confirmation que (1) leur pension n'augmenterait que de 1,9% (1,1% en mars, 0,8% en septembre), (2) les pré-retraités de 57 à 60 ans devraient pointer prochainement au chômage, (3) la durée de cotisation retraite passerait mécaniquement à 41 ans et (4) qu'ils risquent d'être radiés du chômage après deux refus d'emploi comme tout chômeur. 60%* des seniors (55 à 65 ans) ont été ainsi précarisés en quelques jours.
Traité SimplifiéLe 3 janvier, le Conseil des Ministres adoptait le "projet de loi constitutionnelle modifiant le titre XV de la Constitution", proposé par la Garde des Sceaux. Mais quelques mois plus tard, ce projet censé relancer la construction européenne s'écrasait en Irlande, seul pays européen à avoir choisi la ratification par référendum. Déjà lourd de quelques centaines de pages, ce traité fut encore charcuté lors du dernier Conseil Européen de l'année, le 12 décembre dernier. On veut nous faire croire que tout va bien...
Travail le dimancheMême si l'examen de cette loi est reportée au 15 janvier 2009, ses supporters devraient s'interroger sur le rétrécissement brutal de son périmètre. Nicolas Sarkozy, qui travaille lui-même rarement le dimanche, a usé et abusé du fameux exemple des ouvertures de magasins sur les Champs Elysées à paris. In fine, il a accepté de limiter le projet de loi à la légalisation des ouvertures actuelles.
"Travailler plus pour gagner plus"
Ce slogan mérite un blog à lui tout seul. Votée dans l'urgence dès juillet 2007, la loi TEPA exonérait les heures supplémentaires d'impôt et de cotisations sociales. Effet d'aubaine, les entreprises ont pu en profiter. Le marché de l'intérim s'est effondré dès le mois d'avril. En 2007 déjà, les Français n'ont pas travaillé plus. Le pouvoir d'achat a-t-il cru pour autant ? Non. L'envolée des prix de l'énergie et des matières premières conjuguée à une faible augmentation des salaires ont sabordé l'efficacité du dispositif. En 2008, le pouvoir d'achat des Français a baissé, le chômage technique s'étend, les destructions d'emploi se multiplient. On ne cherche pas à travailler plus, mais à travailler tout court.
Il y a presque un an, un confrère blogueur commentait ainsi l'actualité présidentielle : "Pour l'instant, la seule opposition véritable, c'est la réalité."
Un an plus tard, le constat tient toujours. En 2007, Sarkozy a conduit une campagne électorale victorieuse, sur des promesses intenables, ou des mensonges grossiers qui n'engagent que ceux qui y ont cru. Le débat électoral méritait mieux que ces intoxications.&alt;=rss