Magazine

Plus autonome, le Groenland commence à se rapprocher des Etats-Unis

Publié le 25 décembre 2008 par Theatrum Belli @TheatrumBelli

Le Groenland, combien de divisions ? Le vote massif, le 25 novembre, en faveur d'une autonomie élargie, qui ouvre la voie à l'indépendance de ce territoire aujourd'hui sous souveraineté danoise, alimente les convoitises de ses grands "voisins". Mais quel genre d'indépendance pourrait envisager ce pays de 56.000 habitants, essentiellement Inuits, potentiellement si riche et si stratégiquement placé ?

GROENLAND.JPG
Par le biais de son appartenance au Danemark, le Groenland est aujourd'hui la seule fenêtre de l'Union européenne (UE) sur la zone arctique, sur ses richesses supposées (plus de 20% des ressources mondiales en hydrocarbures non prouvées selon l'Institut géologique américain) et sa future route maritime raccourcie vers l'Asie, à mesure que le réchauffement climatique réduit la banquise. Une zone qui, selon les points de vue, doit être absolument exploitée ou préservée.


Depuis cet automne, l'UE semble avoir enfin découvert cette île grande comme quatre fois la France après avoir publié un plan d'action pour l'Arctique. Cet intérêt bien compréhensible et tardif est reçu avec un certain scepticisme sur place : "L'UE ne fera pas beaucoup de progrès avec sa politique arctique tant qu'elle voudra sanctionner notre chasse traditionnelle à la baleine et au phoque, avertit Inuuteq Holm Olsen, vice-ministre des affaires étrangères. Elle agit comme un vieux pouvoir colonial qui veut nous dicter comment faire, et c'est précisément ce dont nous nous éloignons avec ce processus autonomiste. Ce que je crains, si cela continue, c'est que nous arrivions à un point où les Groenlandais disent que c'est trop compliqué de travailler avec l'UE."

Pour l'instant, le gouvernement groenlandais n'a pas de politique officielle. C'est par Copenhague que se traitent encore la plupart des affaires qui engagent la souveraineté du Groenland. Mais bien qu'à travers son appartenance au Danemark, les Groenlandais soient citoyens de l'UE, le Groenland est à ce jour le seul pays à avoir quitté l'UE à la suite d'un référendum, en 1985. Les relations sont actuellement organisées dans le cadre des pays et territoires d'outre-mer.

Tourner le dos à l'Union européenne n'est toutefois pas une option pour Per Berthelsen, ministre des finances et des affaires étrangères : "Si le Danemark adoptait l'euro, il serait plus sage pour nous de le faire aussi. Nous avons vu comment tout le système monétaire vient de s'écrouler en Islande". En même temps, le Groenland marque de plus en plus sa volonté d'élargir son horizon. M. Berthelsen vient juste de signer un accord fiscal pour éviter la double imposition avec les Etats-Unis.

C'est un signe parmi d'autres. "Aujourd'hui, toutes nos exportations passent par le Danemark, dit M. Olsen. Mais nous travaillons petit à petit à établir des relations avec les Etats-Unis". Plusieurs interlocuteurs du Monde citent d'ailleurs la doctrine Monroe, qui remonte à 1823, selon laquelle le Groenland appartient à la sphère sécuritaire des Etats-Unis. Le gouvernement américain entretient depuis un demi-siècle une base aérienne à Thulé, dans le Nord-Ouest. "Nous avons les mêmes intérêts sécuritaires que les Etats-Unis et nous avons de bonnes relations avec eux", note Aqqaluk Lynge, président de la branche groenlandaise du Conseil circumpolaire inuit. "Les Américains, au nom de la doctrine Monroe, vont-ils venir nous dire qu'ils vont nous offrir leur protection, s'inquiète l'écrivain Hans Anthon Lynge. Que leur répondra alors un Groenland indépendant ? Je ne veux pas devenir américain. Je crois que cela a malgré tout été une bonne chose que nous ayons été colonisés par le Danemark, un petit pays. Si cela avait été les Etats-Unis, nous serions devenus une minorité, regardez Hawaï."

D'autres, comme Per Rosing-Pertersen, député Siumut, le parti social-démocrate dominant depuis trente ans, imaginent une coopération renforcée avec l'Islande et les îles Féroé. "Nous avons un énorme intérêt géopolitique qui ne va faire qu'augmenter à l'avenir. A trois, nous serions beaucoup plus forts pour négocier avec l'UE une politique de la pêche par exemple."

Les Chinois aussi sont très intéressés. "Notre premier ministre a été invité en Chine, où nous avons rencontré leurs plus importants représentants", raconte Kaj Kleist, son directeur de cabinet. Et les Chinois sont prêts à envoyer des milliers d'ouvriers pour construire l'usine d'aluminium projetée sur la côte ouest.

Source du texte : LE MONDE.FR


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Theatrum Belli 20892 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte