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La plaine était toute ventrue de neige
repue de calme et de silence,
j'avais tracé un arbre pas après pas sur sa poitrine blanche,
tournant avec mes doigts sa chevelure d'ange
autour d'un tronc rugueux,
empreintes d'abondance de ramures dentelées
aux épaules du pré
en aube d'ivoire de première communiante
les branches au large suspendues à l'air transparent chantaient,
sous le bleu de chauffe du ciel citronné de soleil en herbe
l'arbre a bientôt fondu dans le ventre de la tourbe moite,
juste le temps de la toute dernière arabesque à disparaître sous la terre
et les corbeaux se sont envolés du hâve naufragé
brisant le ciel d'un arc tendu d'archers vifs
aux carquois du bec une flèche enluminée de cris pointus
perçant les nuées percalines céruléennes d'hématomes noirs.
Le silence stupéfait de l'envol de l'arche rutilante
s'est rendu en sa contrée déserte sous la tourbe, sidéré et mutique.
La plaine était toute ventrue de neige,
calme et repue,
j'avais pas à pas en silence dessiné un arbre couronné d'anges
et verni de corbeaux,
des bourgeons de coriandre et baies roses de givre,
des calices de pourpre dans le bec des oiseaux,
l'arbre s'est envolé de la toute dernière arabesque
enroulé dans le cri des corneilles sur la plaine blanche.