Faire buter un patron salaud avec ses indemnités de licenciement, c'est l'idée de Louise, qui engage un soi-disant tueur pour faire le boulot. Ce n'est que le début de Louise-Michel, troisième film du duo Delépine-Kervern, et sans nul doute celui qui possède le plus gros potentiel populaire. Parce qu'il raconte une histoire simple et méchante, rappelant certains reportages du Groland. Et parce que le noir et blanc n'est plus de mise, laissant place à une couleur un peu crasseuse rendant grâce aux paysages picards. Ah, Saint-Quentin, son bar à hôtesses, son palais de justice. Cette parenthèse régionale refermée, revenons donc au film.
Plus populaires donc, mais pas forcément plus percutants, les deux zozos du Groland livrent une comédie sociale souvent féroce, mais qui met en avant leurs difficultés à gérer le format long. Car Louise-Michel, à part quelques très bons gags assez inattendus, c'est un peu toujours la même chose. L'idée de faire finalement tuer le patron par une mourante a quelque chose de terrible, presque au-delà de l'humour noir, mais quand cela se répète plusieurs fois de suite, il est permis de faire la moue.
Idem pour le défilé de guests-stars, souvent inutiles, ne semblant être là que pour permettre aux réalisateurs de montrer qu'ils ont des relations, notamment à gauche. Benoît Poelvoorde est de loin le meilleur d'entre tous, en tordu reconstituant les attentats du 11 septembre. Hilarant. Tout comme Yolande Moreau et Bouli Lanners, de plus en plus à la mode (c'est compréhensible), et qui s'en donnent à coeur joie pour faire profiter au film de leurs physiques bien particuliers. Ils ne sont tout de même pas assez fortiches pour faire oublier le ratage de la fin de Louise-Michel, où Kervern et Delépine tentent à nouveau la carte du surréalisme, et se plantent encore plus que dans Avida. Heureusement que les deux compères ont longtemps fait du ridicule leur marque de fabrique : ça permet de faire ton sur ton.
Bref, s'ils sont évidemment plus drôles que la moyenne des humoristes francophones, ces deux-là ont encore des progrès à faire. Et pourquoi pas revenir au noir et blanc ? La platitude de la réalisation de Louise-Michel est peut-être volontaire (pour se concentrer davantage sur les acteurs et les situations), mais l'image quand même franchement laide. Même en noir et blanc, on aurait compris que les rues picardes et les usines désaffectées ont quelque chose de singulièrement laid. Ils ont l'envie, des sujets à gogo, et un vrai capital sympathie auprès du public : ne leur reste désormais qu'à apprendre la finesse.
6/10