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Poutine-Sarkozy, même combat ?

Publié le 24 décembre 2008 par Hmoreigne

L’avocat se fait procureur. Dans une entretien au quotidien Libération le député socialiste Arnaud Montebourg, ne mâche pas ses mots. Sans détour, il évoque une Poutinisation du régime. Loin d’un simple effet de manches, force est de constater que Nicolas Sarkozy imprime aux institutions une inflexion qui va dans le sens d’une concentration inédite des pouvoirs.

Tel un peintre impressionniste, Nicolas Sarkozy, petite touche par petite touche, a modifié et continue à changer sensiblement le fonctionnement de nos institutions. Un jeu de mikado subtil qui a toutefois ses limites. Aux yeux des socialistes, la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, c’est le projet de réforme du travail législatif.

Nicolas Sarkozy est un homme pressé. Les réformes se multiplient mais peinent à trouver une traduction législative concrète notamment du fait d’un embouteillage sans précédent au parlement. L’opposition a compris que face au rouleau compresseur présidentiel, elle avait intérêt à jouer la montre. Quitte à dévoyer parfois le système par une multiplication d’amendements factices qui n’apportent rien mais, qui retardent tout.

Puisque les règles de fonctionnement du parlement ne permettent pas d’aller vite, il suffit de les changer. Sous prétexte de rationaliser du travail législatif, le Président de la République entend en fait l’encadrer.

Arnaud Montebourg préfère parler d’une atteinte aux droits du parlement. “Cette réforme veut instaurer deux limitations graves des droits du Parlement : l’institutionnalisation de la procédure simplifiée qui existe déjà mais peut recevoir le veto d’un président de groupe. Il s’agit de faire sauter ce droit de veto pour enfermer le Parlement dans les desiderata, voire les caprices de l’exécutif. Et la création d’un «crédit temps» qui vise à faire en sorte que les débats parlementaires ne sortent plus de l’hémicycle. (…) La réforme ferait du Parlement une chambre automatique d’enregistrement examinant des lois fondamentales en deux ou trois jours, sans débats, pour ne pas perturber les plans de l’exécutif.”

A première vue le projet du Chef de l’Etat semble venir en contradiction de la révision constitutionnelle censée renforcer des pouvoirs du parlement votée cet été. En apparence seulement. Plutôt que de donner plus de pouvoir au parlement dans son ensemble, le président semble désireux d’accroître les pouvoirs de la majorité présidentielle, pas ceux de l’opposition.

Le député socialiste voit dans le projet de texte “une opération de l’Elysée pour limiter les pouvoirs d’une opposition qui fait son travail et d’une majorité indocile. Ce sont à la fois les députés de l’opposition et de la majorité qui sont attaqués. Lors de l’examen des lois sur les OGM ou le travail du dimanche, les batailles d’amendements de l’opposition ont révélé les défaillances de la majorité, qui était divisée, et ont permis aux députés UMP en désaccord avec le texte de s’exprimer et de s’affranchir.”

Mais Arnaud Montebourg va plus loin et, replace le projet gouvernemental dans un cadre plus général. “Ce texte participe à une opération de plus grande envergure de l’Elysée visant à écraser toutes les formes de contre-pouvoir. Les perquisitions se multiplient chez les avocats ou les journalistes, comme les pressions sur les juges. Après avoir pris le contrôle de nombreux médias privés à travers ses amis du Fouquet’s, Nicolas Sarkozy vient faire de même avec les chaînes et radios publiques. Il fait courir un risque grave à la démocratie, il s’agit bien d’une poutinisation rampante”.

Poutine-Sarkozy, même combat ? Les tentatives de diabolisation du candidat de l’UMP lors de la campagne présidentielle, s’étaient révélées contreproductives. La leçon doit être retenue. Les procès d’intention sont voués à l’échec. Les faits à eux seuls suffisent. Mis bout à bout ils permettent de retracer le chemin parcouru en terme de régression démocratique.

Immergés dans leurs soucis quotidiens, les français ont voulu se choisir un homme providentiel, un super président qui tranche avec les années Chirac marquées par un immobilisme décadent. Fort du trousseau de clés de la maison France, le nouveau locataire de l’Elysée veut se charger de tout mais, seul. Le réveil risque d’être difficile d’autant que la sage précaution n’a pas été prise de ranger un double dans un tiroir.


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