Pour tourner Largo Winch, Jérôme Salle avait mis toutes les chances de son côté : un budget confortable (pour une production française, en tout cas), une préparation rigoureuse... À l'écran, il faut bien le dire, ça se voit : Largo Winch sent l'extrême professionnalisme, prouvant que Salle et ses collaborateurs ont bien retranscrit les leçons apprises ailleurs. Plus que jamais, le film semble tout droit sorti des States. Le cadre est beau, les scènes d'action efficaces, les vues aériennes assez impressionnantes. Du beau travail.
Mais tout n'est pas à l'unisson : l'immense défaut du film, c'est son scénario, qui n'a rien de catastrophique mais rend l'ensemble sacrément ennuyeux. On entre rapidement dans un faux rythme un peu léthargique, noyé sous les flashbacks plus ou moins utiles. Pire, le film d'action semble souvent disparaître au profit d'un thriller financier pour le moins gonflant, où l'on s'affronte à coups d'OPA hostiles au lieu de se savater la tronche. D'où un profond désintérêt pour l'intrigue, vaste succession de trahisons et de révélations pas trop mal amenées.
Reste donc la relative beauté plastique de l'ensemble, et le charme d'un Tomer Sisley plutôt à l'aise alors que ce n'était pas gagné. Il a la chance d'échapper à l'un des maux frappant le film : le budget perruques. Miki Manojlovic, Kristin Scott-Thomas ont droit, l'un après l'autre, à des compléments capillaires censés refléter leur personnalité (le PDG vieillissant, la financière aux dents longues, la mercenaire aux identités multiples), mais qui ont surtout tendance à les ridiculiser et à leur ôter toute crédibilité. La belle Scott-Thomas ressemble à Cruella !
Salle et ses coscénaristes savent en tout cas ce qu'il leur reste à faire s'ils parviennent à monter Largo Winch 2 : muscler leur script, le rendre moins austère, et virer le (ou la) responsable cheveux. C'est tout ce qui manque à Largo Winch pour parvenir à rivaliser avec certains de ses homologues américains, aussi intelligents qu'haletants. Un tout petit fossé qui semble bien difficile à franchir pour les cinéaste sfrançais, aussi ambitieux soient-ils...
4/10