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Saga Belgica : monarchie, particratie et naphtaline

Publié le 23 décembre 2008 par François Collette

Après une longue valse-hésitation, le roi a enfin décidé d’accepter la démission non pas de Leterme seul mais du gouvernement tout entier. Disons plutôt qu’il n’a fait que ratifier ce que le puissant CD&V (chrétiens-démocrates flamands) l’a pressé de faire, lui qui ne veut pas que son poulain Leterme porte le chapeau pour tout le monde au risque de briser sa carrière politique (c’est Monsieur 800.000 voix flamandes, ne l’oublions pas). Le gouvernement Leterme Ier est donc maintenant « en affaires courante », autrement dit au pouvoir limité jusqu’à la constitution du successeur.

Il y avait urgence mais outre l’urgence que tout le monde comprend, il urgeait aussi que le roi prenne enfin sa décision pour une raison bien simple et très terre à terre : son discours de Noël. En effet, comme toutes les déclarations publiques du monarque, le fameux discours lénifiant de platitudes doit être contresigné par un (premier) ministre. Pas de gouvernement, pas de ministres et donc pas de discours (l’enregistrement a d’ailleurs été reporté pour cette raison). Marrant, non ? Voici un « chef d’Etat » dont le pouvoir est d’accepter ou non la démission d’un gouvernement qui ne peut pas parler au peuple, même pas dire des banalités, sans être « couvert » par un ministre.

Accepter la démission du gouvernement plutôt que celle de son chef, est-ce une bonne décision alors que de gros dossiers sont pendants ? L’avenir nous le dira. Dans le climat délétère qui règne en Ubuland, il n’y avait peut-être pas d’autre choix. On ne s’est pas bousculé au portillon pour devenir Premier ministre et aucun des candidats pressentis n’a accepté la fonction ou obtenu le consensus des autres partis de la majorité sortante. En Belgique, l’intérêt du parti prime toujours sur l’intérêt de l’Etat, c’est la particratie qui règne et particulièrement à six mois des élections régionales qui figeront pour longtemps la carte politique de ce pays en décomposition. L’arrogant CD&V veut garder « son » premier ministre et « son » ministre de la Justice, les libéraux du nord (ennemis jurés du CD&V) et du sud veulent (le francophone) Didier Reynders (MR) dont les socialos du nord (pourtant dans l’opposition) mais surtout du sud ne veulent absolument pas car, soi-disant, « il est cité dans l’affaire Fortis ». Avec l’appui du PS et du SPa (socialistes flamands), le CD&V a proposé l’ancien premier ministre Dehaene (actuel président de Dexia), ce qui fait hurler les libéraux.

Le parfait imbroglio. Un grand classique en Belgique. Et comme on pouvait s’y attendre, le manège royal s’est remis à tourner. Le Roi vient de nommer un « explorateur ». Je vous l’avais bien dit que ça se passerait comme ça. Tonton Albert s’est une fois de plus vu contraint d’aller rechercher une vieille gloire pour tenter de voir clair dans le marigot : Wilfried Martens, ancien premier ministre de 1979 et 1992 et inoxydable président du Parti Populaire Européen (PPE). De quoi préparer la venue d’une autre vieille gloire, le sieur Dehaene dont il est question ci-dessus.

C’est ça la Belgique politique. Monarchie, particratie et naphtaline.

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Le monopole du CD&V (La Libre Belgique)

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