Doit-on s'interroger sur l'instrumentalisation des enquêtes judiciaires au profit du pouvoir en place ?
Oui.
Une belle tradition
Sous François Mitterrand, les écoutes téléphoniques, illégales, visèrent nombre de personnalités publiques. D'aucuns se rappelleront les affaires de la Mairie de Paris, révélées au grand jour par l'action conjuguée de citoyens persévérants et ... de l'équipe Balladur lors de la campagne présidentielle de 1995 : HLM de Paris, marchés truqués des lycées d'Ile-de-France, emplois fictifs à la Mairie, financement des voyages de Chirac et de son entourage, tout y passe. On se souvient également des soupçons pesant sur Sarkozy, alors ministre du Budget, d'avoir multiplié les contrôles fiscaux contre les proches de Jacques Chirac.
Certains journalistes sont d'ailleurs moins imperméables que d'autres aux manipulations des Renseignements Généraux. A entendre Jean-Marie Pontaut, journaliste à l'Express, lors des Etats Généraux de la Presse en novembre dernier, on se demande qui manipule qui. Ce dernier expliquait qu'il a souvent rencontré Yves Bertrand, l'ancien patron des RG; que ce Bertrand était l'un des hommes les mieux renseignés de France et une très bonne source d'information ("on se voyait, il me passait des informations"). Bizarrement, dans la même intervention, le journaliste ne justifie jamais pourquoi il n'a jamais révélé à ses lecteurs les tentatives de manipulations dont il était comme d'autres victime ("il a essayé de me manipuler"). Mais Pontaut explicite très clairement que certaines de ces manipulations émanaient de l'entourage de la Présidence de l'époque.
Déstabiliser Dominique de Villepin
L'affaire Clearstream est nauséabonde. L'ancien premier ministre paye le prix fort de la rivalité Chirac-Sarkozy en 2002-2007. Il sera trainé devant les tribunaux. D'obscurs carnets secrets d'un barbouze de l'Elysée d'antan sont dévoilés dans la presse. Comme le note le Nouvel Obs, Nicolas Sarkozy "a usé de toute son influence pour aboutir à ce résultat." "Le plus haut responsable de l'Etat intervient ouvertement dans le processus", a également expliqué M. de Villepin. "La passion qu'il a mise dans cette affaire a effectivement pesé sur l'instruction". De quoi est soupçonné l'ancien Premier Ministre ? De dénonciation calmomnieuse. Cette accusation a justifié des centaines d'heures d'auditions, et deux années d'enquêtes. Dominique de Villepin a été mis en examen le 27 juillet 2007 pour "complicité de dénonciation calomnieuse", "complicité d'usage de faux", "recel de vol" et "recel d'abus de confiance".
Divertir l'opinion
Les moyens judiciaires et policiers ont également été mis à contribution dans l'affaire "des 9 de Tarnac", ces anarchistes ou membres de "l'ultra-gauche" soupçonnés d'être de dangereux terroristes: des moyens exceptionnels ont été mobilisés début novembre pour mettre en scène leur arrestation, à Tarnac (Lozère). Accusés de terrorisme, leur traitement fut digne de celui réservé à des poseurs de bombes. Las, des magistrats ne suivirent pas les fantasmes sarkozyens. Quatre d'entre eux furent libérés trois semaines plus tard. Vendredi dernier, le juge des libertés et de la détention réclamait à son tour la libération du "cerveau" de cette "cellule invisible." Evidemment, le parquet a fait appel. Le ridicule menace parfois la Sarkofrance.
Déstabiliser l'équipe Royal ?
L'affaire qui frappe Julien Dray survient à point nommé. Xavier Darcos vient de céder, et Nicolas Sarkozy avace lui. la réforme de la classe de seconde est reportée ... d'un an. Alix Nicolet, présidente de la FIDL, maintient la pression : "On ne reprendra pas les discussions tant que le gouvernement ne renoncera pas aux suppressions d’emplois." Comme par hasard, c'est le moment choisi par la police pour perquisitionner le domicile de Julien Dray et son bureau à l'Assemblée Nationale, dans une enquête pour des faits présumés d'abus de confiance qui mouille ... la FIDL. La ficelle est grosse, comme d'habitude en Sarkofrance. cette enquête a été ordonnée par le Parquet de Paris.
Les soupçons sont richement détaillés par LE MONDE: utilisation à des fins personnelles de sommes importantes sur les comptes des associations "Les Parrains de SOS Racisme" et FIDL; financements indus bénéficiant à Julien Dray; soupçons de corruption. Tout y est. L'article rappelle même que le nom de Julien Dray avait été cité dans l'affaire de la MNEF il y a 8 ans.
Le quotidien LE MONDE a soulevé cette affaire, vendredi 19 décembre. Qui signe l'article qui fait la une du quotidienne?
Gérard Davet. Ce journaliste est "bien connu des services de police." Il semble souvent très bien informé par les Renseignements Généraux : ainsi, il fut notamment impliqué dans l'affaire "Mayetic", à Asnière, en 2005 : cette start-up du fermée après une "enquête" de Gérard Davet, largement inspirée par les notes des RG. Gérard Davet fut également condamné en 2005 dans l'affaire Alègre pour complicité de diffamation.
Dimanche, Julien Dray s'est estimé "sali".
"Je vais m'exprimer, mais pas précipitamment.. on m'a sali, et ce n'est pas en cinq minutes que je vais répondre à tout ça"Lire aussi:
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