En ce moment j'écoute le superbe recueil du volume III des Symphonae Sacrae de Heinrich Schütz par l'ensemble Cantus Cölln, sous la direction de Konrad Junghänel, avec la participation du Concerto Palatino (label Harmonia Mundi). Dans la note du23 septembre 2008, j'avais déjà souligné, à propos cette fois de l'interprétation de cantates de Buxtehude, la justesse de ton et ma belle homogéneité de cet ensemble orchestral et vocal.
C'est ici confirmé avec ces deux CD qui regroupent une bonne vingtaine de concerts spirituels composés par Heinrich Schütz au lendemain de la guerre de trente ans. Pour le contexte historique et les contraintes qui s'imposaient aux compositeurs allemands au milieu du XVIIème siècle, je vous propose de vous rapporter à la note du 6 janvier 2007 que j'avais consacrée à la belle version du Magnificat de Schütz par l'ensemble de la Chapelle Rhénane.
Le génie de Heinrich Schütz est d'avoir transformé cette contrainte en un genre, permettant de varier dans ses concerts spirituels les effectifs vocaux, distinguant les "voix nécessaires " et les "voix facultatives". Schütz avait appris, aux côtés de son maître Giovanni Gabrieli à Venise, les techniques de composition multi-chorales. Cette pratique, à savoir des pièces sacrées disposant d'une ampleur exceptionnelle avec deux à trois chœurs, eux-mêmes doublés de cornets et de trombones, sera également assez répandue dans l'Allemagne luthérienne avec des compositeurs comme Samuel Scheidt (cf. note du 29 février 2008).
Dans le recueil interprété par le Cantus Cölln, on est plongé dans ces concerts spirituels, des plus intimes à cinq voix obligées, aux plus amples et colorés à huit voix.
Les cornets et des trombones, avec l'excellent ensemble Concerto Palatino, redoublent de virtuosité pour se hisser au niveau de celle de voix. Les ensembles vocaux sont justes, homogènes. La direction de Konrad Junghänel mélange subtilement humilité et ferveur. La musique de Schütz déploie alors ses couleurs et sa beauté avec un grand naturel. Rien d'austère ou de forcé. Au contraire.
Parmi les différents concerts spirituels, je reste fasciné par le troisième "Wo der Herr nicht das Haus bauet", SWV 400 où les voix féminines célestes s'envolent irrésistiblement pour être rejointes par le reste du cœur, aboutissant à un ensemble d'un magnificence incroyable.
Ce disque est vraiment splendide.
Lien direct vers le site du label Harmonia Mundi pour le détail du disque et pour écouter des extraits.
Heinrich Schütz - Symphonae Sacrae III - Cantus Cölln - Direction, Konrad Junghänel - Concerto Palatino - label Harmonia Mundi.