M.G. Le Clézio : Dans la forêt des paradoxes. Extrait du discours…
Le roman est mort, la littérature est morte, entend-on tous les jours. Gros mensonge, évidemment, la littérature existera toujours. Et là, dans cette forêt profonde et primitive, dès que deux hommes s’assoient au coin du feu, elle apparaît aussitôt, la littérature, sous la forme d’histoires qu’on se raconte ou qu’on invente, sous la forme de mythes fantastiques qui parlent de la création du monde. L’homme est fait pour conter, semble-t-il. Notre propre passion des livres ne remonte-t-elle pas à ces histoires merveilleuses qu’on nous lisait quand nous étions enfants ? Aux origines de notre vie comme aux origines de l’humanité, nous retrouvons les contes, issus de la grande tradition orale. La littérature existait donc avant l’écriture elle-même. Elle est tentative d’explication du monde ambiant, monde qu’elle rend par ailleurs compréhensible par l’interprétation qu’elle en donne.