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Seegubali ou le duel des sentiments par Oumar N'Diaye

Publié le 20 décembre 2008 par Bababe

Ciré prépare son retour au pays...

Seegubali n’est pas seulement un poème Pekane à écouter avec tristesse mais des recommandations importantes pour que la jeunesse peule confrontée à des migrations forcées ou instructives puissent valoriser encore plus ce lien à l’honneur et aux traditions afin de ne pas vivre les surprises désagréables qui ont conduit Samba à ce drame douloureux et poignant.  

Le duel entre honneur et le prestige  dans le Pekane de Guelaye Ali Fall.  

 Si le peul d’aujourd’hui a pu se concilier avec certains interdits religieux, il perpétue la tradition de braver ceux qui entachent son honneur, sa fierté et son estime de soi, le récit tragique Seegubali de Guelaye Ali Fall s’inscrit dans cette tradition millénaire illustre bien son refus permanant de se frotter au déshonneur, d’où la force de cet adage peul qui préconise qu’on défie la balle mortelle provenant des tirs d’ennemis en l’affrontant avec courage sans jamais chercher à se dérober de la mort inévitable qu’elle provoquera. On mesure alors à quel point la fierté peule concilie l’honneur à la vie.  

L’amour tragique dans le récit magistral de Seegubali dans les diatribes pekaneennes du regretté Ali Hamidine Samba Ali Modi dit Guelaye, qui va conduire Samba à défier la mort annoncée au nom des principes de la fierté peule et des exigences de la femme peule, renforce cet attachement de la société peule aux principes de l’honneur  

Je ne peux aborder Seegubali sans faire un clin d’œil à Mamadou Bocar Paate Maadi Thilam, l’homme de Jowol Yowi loode, libaa loo-nde dacca doo-ndiido, plus connu sous le pseudonyme de Dikal N’DIAYE, en réalité il est l’initiateur de Gueelel aux rites et secrets de Pekane.  

L’histoire de Seegubali retrace la vie d’un homme qui a su s’enrichir en biens matériels par ses voyages et par son sens d’affaire, en sacrifiant les valeurs familiales sacrées dans la tradition peule. L’homme peul s’identifie à sa famille (épouse et enfants) et à son bétail, voilà les bases de la richesse et du respect en milieu peul. Le sens des responsabilités familiales ainsi que la pugnacité née des transhumances éprouvantes déterminent le courage puis l’admiration du peul. 

  Certains se poseront la question : comment un homme peut-il payer au prix fort de sa vie, pour retrouver l’honneur puis l’amour d’une femme ? Poser une telle question revient à mal connaître la fierté accordée aux valeurs traditionnelles par les dignitaires peuls.   En réalité Seegubali n’est autre que le nom de scène attribué au mythique lieu où se jouera ce drame, c’est-à-dire une belle, triste et tragique histoire d’amour. Est-ce la volonté de mystifier la célébrité peule ou le souci de protéger cet héritage symbolique aux générations futures? La question reste posée.  

Dès son jeune âge, Samba avait décidé de tenter sa chance ailleurs vers des terres lointaines, il avait quitté son village pour à la quête d’avenir meilleur, quelques années plus tard, le prestige de l réussite était là, mais le déchirement familial et la nostalgie de son Fuuta natal  lui pesaient énormément, c’est ainsi qu’il décida de retrouver ses proches et surtout sa terre natale.  

 De retour au village, il était devenu ce bel jeune homme, riche, respecté et apprécié, cependant sa vie de célibataire qui n’était pas conforme aux normes de sa société ne va tarder à lui rappeler que le sacrilège familial prime sur les biens de la vie.  Comme tout bon villageois, il s’est remis à l’agriculture, à l’élevage et à la pêche, cependant on le voyait souvent à la peine dans ses activités faute de bras, car il n’avait ni épouse ni d’enfants.  

Un jour comme l’exige la tradition villageoise, le chef du village sollicita une journée de travail d’intérêt général, c’est ainsi qu’il s’est retrouvé tout seul au milieu des adolescents venus assurés le service à la place de leurs parents. Seul adulte au cœur de cette bande d’adolescents, qui refusait à ce qu’il fasse sa part du travail, car les traditions africaines conseillent à ce que les plus jeunes respectent et apportent leurs aides à leurs ainés. En un éclair, le travail est achevé et Samba blessé dans son orgueil, était là pensif, assis sur la pierre d’un champ, avec l’affront dans le ventre et le cœur lourd d’émotions. Il venait de découvrir que tous ces jeunes n’étaient d’autres que ceux de ses propres amis (de même génération).  

Pour la première fois l’amertume et le regret né de cette vie de célibataire le gagnèrent fortement pour finalement l’obliger à fonder un foyer dont l’élue reste à choisir, dans l’espoir de laver cet affront.  

Si la société occidentale encourage qu’un couple se teste avant le réel ménage, la tradition peule privilégie l’art de se former dans la découverte dans le cadre d’un ménage réel, chez la première les divorces douloureux sont souvent plus nombreux, alors qu’ils restent rares et atténués chez la dernière. 

  De retour à la maison, il se confia à sa mère, comme l’exige la coutume, elle le conseilla de ne jamais se marier, tiraillé entre les conseils de sa mère et la ferme volonté de laver l’affront de la journée, il décida de transgresser outre les paroles sacrées de sa mère, celles-là même qui l’interdisait à vie le mariage, car de cet acte grandiose viendra sa mort. Sous l’insistance de son fils, elle finira par céder avec la prime l’autorisation d’aller demander la main de la belle, généreuse, grande, fière et gaie Coumba sa cousine,. 

  Là où certains Sy, Diop, Dieng ou Diack, préfèreront offrir quelques billets en euro comme dote pour acheter en silence les défis exigeants de Sira Pullo, Samba offrira sa vie en combattant le monstre de ngawlé afin de d’honorer avec fierté et bravoure les exigences de Coumba, qui réclamait la viande du monstre de ngawle pour assurer le prestigieux traditionnel repas de mariage.

La morale de l’histoire enseigne que l’homme peul doit rester ancré dans les valeurs traditionnelles qui l’ont pétries et façonnées, quelque soit sa réussite sociale et qu’il ne doit jamais s’asseoir sur le code d’honneur peul pour satisfaire un désir personnel qui sape cette fierté.  

Oumar Moussa N’DIAYE          


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LES COMMENTAIRES (1)

Par Couro Anne
posté le 02 janvier à 12:12
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Bonjour, c'est joli et en plus une belle histoire d'amour même si c'est tragique à la fin.

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