Ils étaient venus faire l’expérience de l’euphorie, se sentir élevés, Dave le savait, transportés hors de leur existence par le rare spectacle de la victoire. Raison pour laquelle les arènes et les stades de base-ball évoquaient toujours des cathédrales vibrant de lumières, de prières chuchotées et des battements de quarante mille cœurs unis par le même espoir collectif.
Gagnez pour moi, les gars. Gagnez pour mes gosses. Gagnez pour mon mariage, afin que je puisse rapporter votre triomphe dans la voiture avec moi et m’en imprégner avec ma famille pendant qu’on retourne à nos petites vies sans gloire. p. 58-59
Toute sa vie on aspire à ce genre de chose. On a beau à essayer de se persuader du contraire, c’est vrai. On rêve de vivre un drame. Pas celui des factures impayées ou des chamailleries domestiques. Non. Ce drame-là était bien réel, et en même temps, il dépassait la réalité. Il était hyperréaliste. Dave avait peut-être tué un voyou. Auquel cas, la police chercherait le coupable. Et la piste les menait jusqu’ici, jusqu’à Dave, les enquêteurs auraient besoin de preuves. p. 69
On devine parfois la vérité au plus profond de son âme, et nulle part ailleurs. On la devine parfois confusément, au-delà de toute logique, et on a en général raison quand elle est de celles qu’on ne veut pas affronter, qu’on est pas sûr de vouloir affronter. Alors, on tente de l’ignorer, on va consulter un psychiatre ou on passe de longues heures dans les bars à s’abrutir devant les écrans de télévision, tout pour essayer d’échapper à ces vérités trop dures, trop laides, que l’âme a identifiées bien avant l’esprit. p. 123
Dennis Lehane