Auteur du magnifique La petite Jérusalem, Karin Albou nous revient avec une oeuvre à nouveau marquée par la religion et la chair. Sous une apparence classique, Le chant des mariées offre un nouveau regard sur des thèmes tels que le mariage forcé et l'appréhension de la nuit de noces, mais aussi sur la menace nazie, incessante et lancinante. Situé en Tunisie, le film se base sur une simple histoire d'amitié entre une musulmane et une tunisienne, mais dépasse rapidement le sempiternel refrain "différentes mais unies" pour aller explorer des terrains bien plus sombres.
Que l'image - bleutée, limpide - ne trompe pas : le pessimisme et la peur dominent ce Chant des mariées, où la découverte de la féminité prend des allures de torture - terrifiante scène d'épilation - et où les êtres sont si faibles qu'ils peuvent être tentés par la collaboration avec l'oppresseur. Ce qui peut donner lieu à quelques scènes un rien schématiques, mais finalement emportées par une certaine beauté formelle. La destinée des deux héroïnes a de quoi captiver jusqu'à la fin.
Dommage cependant que Le chant des mariées pâtisse de quelques défauts typiques d'un premier long, et beaucoup moins excusables ici : la direction d'acteurs est parfois un peu lâche, et certaines erreurs techniques viennent couper l'élan du spectateur - il faut virer le perchman. C'est toute la bizarrerie du film, qui semble moins mûr et abouti que la première oeuvre de la réalisatrice. Plus fauché, aussi. On attend la suite du travail d'Albou avec une certaine fébrilité.
6/10
(également publié sur Écran Large)