Je ne parle bien entendu pas des menaces d’attentats, lesquelles doivent être prises très au sérieux, même si la découverte, hier, dans un grand magasin de pains de dynamite, n’est sûrement pas le fait d’Alqaïda ou d’éléments de sa nébuleuse : ils ne prennent pas la précaution d’alerter les pouvoirs publics, fût-ce par un communiqué adressé à un organe de presse, et utilisent – sans nulle sommation - des explosifs dévastateurs.
Mais imaginez des Sarko’s Boys tout de bleu uniforme vêtus déboulant chez vous à «l’heure du laitier» et vous conduisant manu militari, menottes aux poignets dans le commissariat le plus proche, ensuite de quoi, ils vous inviteraient à vous déshabiller complètement – sans nul doute pour confirmer que vous n’appartenez pas à la corporation des modèles d’artistes parisiens qui viennent de manifester nus dans la froidure de l’hiver précoce pour revendiquer de meilleures conditions de salaires…
Ensuite de quoi, faute de «détecteurs de mensonges» hi-tech, ils vous soumettront à un interrogatoire serré. Ambiance «polar» : lumière crue, intimidation alternant avec quelque promesse ou fausse connivence selon les intervenants – «bonhomme» ou méchant – et entre les séances, vous feront croupir dans un antre nauséabond.
«Où étiez-vous et que faisiez-vous le 11 septembre»… sans plus de précision.
Dame ! C’est que le 11 septembre, la logique calendaire veut qu’il y en ait un chaque année… Lequel ?
Sur le plan historique, j’en connais trois…
En 2001, certains – dont Ignacio Ramonet dans le Monde diplomatique - ont opportunément rappelé celui de 1973 : le coup d’Etat de Pinochet au Chili et la mort de Salvador Allende… Curieusement, c’est le plus éloigné et j’en garde un souvenir très précis. On ne pourra rien me reprocher, et surtout pas d’y avoir participé !
En 2001, j’étais allongée sur mon lit et je lisais le Monde quand une voisine est montée me dire «branche la télévision, il se passe quelque chose de monstrueux !»… D’autant plus choquée qu’elle était hôtesse de l’air. Abasourdies, nous avons assisté à des scènes proprement hallucinantes, dignes du scénario d’un «film catastrophe». Mais c’était hélas du bien réel.
Tout simplement parce que les mouvements de «yo-yo» de la Bourse sont tellement nombreux, irrationnels, voire «contra-cycliques» qu’il eût été – malgré les menaces et avertissements qui n’avaient guère manqué – quasi impossible de détecter, sur une seule séance – qu’il s’agissait là du point de départ du malstrom qui dévasterait la «Planète finance» et par le même mouvement «l’économie réelle» dans son entier.
Nul hasard que ce petit retour sur le 11 septembre 2001… En effet, je ne lisais pas n’importe quel article dans le Monde ! Il s’agissait d’une recension des «plans sociaux» et autres vagues de licenciement qui se préparaient… La situation économique, ici comme aux Etats-Unis, n’était en effet pas – déjà ! - des plus florissantes.
Sans même parler du krach de la «nouvelle économie» dont on nous avait si longtemps et ad nauseam rebattu les oreilles ! Encore une fois, il s’agissait de laisser penser que l’on pouvait s’abstraire de «l’économie réelle» - fi dont ! dirait un Solognot… l’industrie et l’agriculture ne sont pas assez «nobles» pour les crânes d’œuf qui gouvernent (si mal) la planète…
Comme aujourd’hui, les pontes de la finance – avec en tête, Alan Greenspan, ancien président de la Réserve fédérale, la banque centrale américaine – y ont répondu par le seul moyen qu’ils sont susceptibles d’imaginer : la baisse de taux d’intérêt… Je lisais hier en fin d’après-midi sur E-24 sur le site de «20 minutes» qu’ils étaient désormais proche de zéro aux Etats-Unis : vive l’argent gratuit !
Mais rassurez-vous : ce n’est pas pour le vulgum pecus des consommateurs et emprunteurs ! Ceux qui se sont endettés jusqu’au cou pour acquérir un logement hors de prix (du fait de la «bulle immobilière») et sont étranglés par un «crédit relais» alors qu’ils n’arrivent pas à vendre leur ancien logement, n’auront toujours que leurs yeux pour pleurer…
Or, un effet pervers non négligeable – et sans nul doute en grande partie responsable de la crise financière actuelle – de la baisse des taux a été de rendre le crédit encore plus «facile», non seulement pour les particuliers – les Américains sont incontestablement les champions du monde pour le crédit – mais surtout pour les financiers qui en ont amplement profité pour spéculer de plus en plus et créer des instruments monétaires ou autres utilisant à plein régime cet «effet de levier».
Notamment les fameux LBO qui ont consisté à acquérir des entreprises à crédit, en profitant de cet «effet de levier» : rendement maximum pour une mise de fonds relativement modeste – grâce au crédit… J’ai déjà dit ici tout le mal que je pensais de ces LBO(a)constrictor…
La recherche de rentabilité accrue n’avait rien à voir avec une bonne gestion et l’activité réelle de l’entreprise achetée (investissements, ressources humaines…) puisqu’il s’agissait uniquement de «se payer sur la bête» : en tirer le maximum de profits dans le minimum de temps, la rentabilité recherchée ne servant qu’à faire supporter à l’entreprise la charge des emprunts pour la revendre le plus vite possible à un prix nettement supérieur à celui de son acquisition : parfois dix fois la culbute !
Le même mécanisme pouvait s’observer dans les sphères financière et boursière, avec l’accélération sans précédent des mouvements d’échange – on ne s’intéresse plus aujourd’hui qu’à la notion de «flux» et si la merde humaine était cotée, nul doute que les traders se l’arracheraient : «l’argent n’a pas d’odeur» !
Les gros investisseurs acquérant souvent les titres à crédit ou les négociant «à terme» en espérant que d’ici le moment de les régler, leur valeur aurait enregistré un formidable bond en avant qui permet de les revendre – également à terme, pour tirer davantage profit de l’envolée continuelle des cours - avec de substantielles plus-values. Notez, entre autres illustrations, que c’est le mécanisme qui a perdu Jérôme Kerviel : il n’avait pas anticipé le retournement à la baisse.
Cet épisode à 5 milliards d’euros - il fait désormais figure de “perd-petit” ! - eût du mettre la puce à l’oreille des magnats de la finance internationale et de leur traders et les inciter à la prudence…Mais basta ! la fuite en avant dans la spéculation à outrance n’en continua que de plus belle jusqu’à la chute brutale du 11 septembre 2008.
Je suis sans doute très pessimiste mais je crains que ni les taux d’intérêt proche de zéro (ils continuent de créer une sorte de monnaie fictive qui n’a aucune contrepartie dans l’économie réelle) ni les injections massives opérées par les Etats pour «sauver les banques» ne redonnent sagesse et prudence aux banquiers.
Tout au contraire, «passer l’éponge» - sur «l’ardoise» qu’ils laissent à la charge des pouvoirs publics - leur donne le sentiment d’impunité… Responsables et coupables mais nullement sanctionnés même si quelques têtes tombent de ça de là, pour l’exemple. Alors que c’est l’ensemble du système qui est en cause.
«Remettre au pot» toujours plus d’argent public en espérant que les financiers ne retomberont pas dans la spéculation à outrance est aussi illusoire que donner des jetons à un joueur invétéré en supposant qu’il ne retournera pas au casino.
Les financiers sont aussi «adddicts» à la spéculation que les junkies «accro» à l’héroïne.