Parmi les leçons de l'actuelle crise, peut être tirée une loi simple de la formation des bulles immobilières, qui explique assez bien pourquoi la bulle des années 1998-2006 est née en certains endroits (France, Grande Bretagne, Espagne, monde anglo-saxon sauf middle America et middle Canada) et pas -- ou moins -- dans d'autres (Middle America, Middle Canada, Allemagne, Japon).
Pour qu'une bulle immobilière se forme, il faut que se trouvent réunis quatre facteurs:
- Une période de confiance en l'avenir, généralement marquée par une croissance au moins "normale", voire "forte".
- - Une démographie du nombre de foyers en hausse, ce qui peut se produire à la fois du fait de la hausse générale des populations, mais aussi de la baisse du nombre de personnes par foyer. Ce phénomène peut être accentué par d'importantes migrations internes qui renforceront la bulle en certains endroits.
- - Un crédit abondant et bon marché, quelles qu'en soient les causes (crédit "naturellement bon marché" ou "artificiellement subventionné par l'état").
- - Des réglementations du sol ou de la construction rendant difficiles l'édification de logements neufs en quantité adaptée à l'accroissement du nombre de ménages.
Que l'un des quatre ingrédients manque à l'appel, et aucune bulle ne se forme :
Les principales agglomérations de la Middle America (Texas, Kansas, Georgie, Nebraska) et quelques cités du Canada central n'ont pas de réglementation anti-construction contraignante: pas de bulle. (phénomène abondamment documenté dans ce blog).
L'Allemagne a une réglementation des sols plus favorable à la constructibilité des sols en périphérie urbaine que la notre (les allemands préfèrent contrôler l'étalement urbain que l'interdire), et une démographie en nombre de foyers moins active que la notre, même si localement, des phénomènes migratoires liés à la réunification créent des poches de tension.
Le Japon a connu sa bulle bien plus tôt que nous, à la fin des années 80 (cf. ce PDF). Depuis, le pays n'a jamais réellement retrouvé la confiance économique, sa croissance y est très molle, et sa démographie est moins active qu'en Europe. Des sources m'indiquent que la réglementation technique de la construction est très contraignante (sismicité) mais que le droit à construire y est plutôt plus facile à obtenir depuis les années 90. Je n'ai pas pu vérifier cette assertion dans des publications académiques. En revanche, les difficultés nées de la géographie tourmentée y ajoutent un élément favorable à l'élévation des prix.
Voilà qui devrait inciter à plus de modération ceux qui ne voient que la main (invisible) d'Alan Greenspan derrière la naissance de la bulle immobilière américaine.
Il reste à déterminer le poids relatif de chaque composante dans la formation de ces bulles. Un bon sujet de recherche...
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