A la santé... près d'ici

Publié le 15 décembre 2008 par Nellym67

Privés de liberté, les hommes enfermés en prison sont aussi privés de dignité, si l'on en croit tous les témoignages relatifs aux conditions de rétention qui sont de plus en plus... inhumaines et acceptables. La vie est dure dedans, mais aussi par conséquent, dehors, après. Si les réformes en cours relatives à la loi pénitentiaire doivent prendre en compte les critères de gestion de l'univers carcéral, elles doivent aussi être intégrées aux processus de garantie des droits de l'homme .

En parallèle,

-un poème d'Apollinaire, A la santé, mélancolique, fruit d'une expérience d'une semaine en prison à La Santé, et dans lequel les lamentations du poète nous plongent dans l'angoisse de l'ennui et de la solitude

et

-le dernier film cosigné par l' OIP et Emmaüs France, qui par le biais d'une fiction mettant en scène la "ville-prison" nous sensibilise à l'univers carcéral.

I Avant d'entrer dans ma cellule Il a fallu me mettre nu Et quelle voix sinistre ulule Guillaume qu'es-tu devenu Le Lazare entrant dans la tombe Au lieu d'en sortir comme il fit Adieu adieu chantante ronde Ô mes années ô jeunes filles Non je ne me sens plus là Je suis le quinze de la Le soleil filtre à travers Ses rayons font sur mes vers Et dansent sur le papier Quelqu'un qui frappe du pied Dans une fosse comme un ours Chaque matin je me promène Tournons tournons tournons toujours Le ciel est bleu comme une chaîne Dans une fosse comme un ours Chaque matin je me promène Dans la cellule d'à côté On y fait couler la fontaine Avec les clefs qu'il fait tinter Que le geôlier aille et revienne Dans la cellule d'à côté On y fait couler la fontaineQue je m'ennuie entre ces murs tout nus Et peints de couleurs pâlesUne mouche sur le papier à pas menus Parcourt mes lignes inégalesQue deviendrai-je ô Dieu qui connais ma douleur Toi qui me l'as donnéePrends en pitié mes yeux sans larmes ma pâleur Le bruit de ma chaise enchaînéeEt tous ces pauvres cœurs battant dans la prison L'Amour qui m'accompagnePrends en pitié surtout ma débile raison Et ce désespoir qui la gagne Que lentement passent les heures Comme passe un enterrement Tu pleureras l'heure où tu pleures Qui passera trop vitement Comme passent toutes les heures J'écoute les bruits de la ville Et prisonnier sans horizon Je ne vois rien qu'un ciel hostile Et les murs nus de ma prison Le jour s'en va voici que brûle Une lampe dans la prison Nous sommes seuls dans ma cellule Belle clarté Chère raison

Septembre 1911.

le film de l'Observatoire international des prisons et d'Emmaüs France :