France/Angleterre 7-24 (Demi finale) à Sydney le dimanche 16 novembre 2003
L’équipe de France à la côte. Elle vient d’aligner une série de victoires impressionnantes : 61/6 contre Fidji ; 51/29 contre Japon ; 51/9 contre Ecosse ; 41/14 contre USA. Et surtout, 43/21 en quart de finale contre l’Irlande. En revanche, les précédentes performances de l’Angleterre laissent sceptique. Elle n’est pas au Top. A l’image de Wilkinson, présenté comme une star en méforme, qui laisse la vedette de ce Mondial à son vis à vis du jour, Michalak. Celui-ci aborde cette demi-finale avec le statut de meilleur réalisateur de la Coupe du Monde 2003. Il est en état de grâce depuis le début de la compétition Michalak, devenu en trois semaines celui dont on parle. Auteur d’un sans faute, il est le diamant d’un quinze de France devenu ambitieux. Un diamant comme celui qui orne le lobe de son oreille. Avec son look de beau gosse, il est devenu la coqueluche de la presse people. Cette Michalak-mania, qui pèse sur cette demi-finale, fait passer au second plan le record du monde de sélections que souffle l’anglais Leonard au français Sella. La composition de l’équipe de France formée par Laporte a fière allure. C’est exactement celle qui a anéanti l’Irlande en quart de finale.
Des nuages noirs tournent dans le ciel pleureur de Sydney. Puis un orage éclate moins de trois heures avant le coup d’envoi. Maintenant c’est une pluie fine et pénétrante qui tombe sur le Stade Olympique rebaptisé Telstra Stadium pour cette Coupe du Monde 2003. Cette demi-finale entre l’Angleterre et la France est bien arrosée. Une vague blanche anime maintenant le stade de Sydney. Dans les tribunes le match est largement gagné par les supporters anglais tous engoncés dans le maillot de l’équipe nationale qui souffre sous l’effet des estomacs dilatés par la bière consommée sans modération depuis plusieurs jours. Les urinoirs sont glissants, la pelouse est glissante, le ballon est glissant. Bref, c’est la soirée de la glisse. Les anglais commencent par gagner par KO le match des supporters. Quand est joué le God save the Queen c’est toute l’Angleterre qui donne l’impression d’être là. Quelques milliers de voix seulement, dont une bonne partie venues de la Nouvelle Calédonie toute proche, accompagnent la Marseillaise.
C’est maintenant l’heure du coup d’envoi. Et déjà, les tricolores sont en difficulté. Une marée blanche déferle dans le camp français. Les anglais tirent les premiers. Neuvième minute, mêlée ouverte dans les 22 mètres, Wilkinson reçoit le ballon dans l’axe. Face aux poteaux, il tente le drop. Et le réussit, 0/3. Mais une minute plus tard, contre le cours du jeu, les français dominés pour une fois dans le camp anglais, voient passer la chance. Et la saisissent. Touche sur les 22 mètres. Le lancer est blanc mais c’est Betsen, les Black des Bleus, qui récupère le ballon. Et fonce vers l’en-but. Hill manque le plaquage. Betsen marque l’essai que transforme Michalak, 7/3. Le seul essai du match, parce que le reste du score se construit au pied. Et à ce jeu-là le buteur français est dans un mauvais jour. Il y a trop de coups de pied au but qui se perdent. Une chandelle qui aurait pu être dangereuse et qui repart dans le dos des tricolores. Deux occasions de but qui pourrait faire 13/3 et qui ne passent pas.
Pendant ce temps Wilkinson, ressuscité, enquille. Trente troisième minute : pénalité réussie après hors jeu de Jauzion, 7/6. Puis, un deuxième drop de 28 mètres face aux poteaux réussi par Wilkinson, 7/9. L’Angleterre repasse en tête au tableau d’affichage. Une minute plus tard elle ajoute trois points juste avant la pause suite à une pénalité réussie par Wilkinson de 42 mètres face aux poteaux. La France est menée 7/15 quand l’arbitre néo-zélandais monsieur O’Brien siffle la mi-temps. Dans le vestiaire français on lit le doute dans le regard des joueurs. Ils se sentient dans l’impasse. Laporte essaie de trouver une sortie. Il fait remarquer, qu’en dépit d’une prestation plutôt moyenne, il n’y a que cinq points de retard. Ce n’est pas la mer à boire ! Si l’équipe de France parvient à faire des conquêtes propres les mouches peuvent changer d’âne. Alors ce n’est pas le moment de lâcher !
En seconde période les tricolores jouent contre le vent. Cela n’arrange pas les choses. Dès l’engagement ils se reprennent en pleine gueule une tornade blanche qui nettoie tout à fond du sol au plafond. En voyant Michalak manquer ses tirs au but les anglais se disent que c’est leur jour de chance. Et se donnent les moyens de ne pas la laisser passer ! Il n’y a rien à lire sur le visage de Woodward que le réalisateur du match s’obstine à nous montrer en gros plan. Cinquante quatrième minute, faute au sol dans les 22 mètres suite à une mêlée ouverte. De 42 mètres face aux poteaux, Wilkinson passe une troisième pénalité, 7/15. Fautes de mains, jeu au pied approximatifs, les français perdent leur rugby au fil du match. Michalak n’est que l’ombre de lui-même : 4 pénalités tentées, 4 pénalités ratées. Et des coups de pied de déplacement défaillants. Betsen accumule trois pénalités avant de prendre un carton jaune pour placage à retardement. Dominici qui se fait déborder à la régulière par Robinson, l’arrête irrégulièrement en faisant un croque-en-jambe sur lequel il se blesse, et se fait expulsé pour dix minutes. A 14 contre 15 pendant un quart de match la France n’est plus en mesure de tenir tête à l’Angleterre. Wilkinson est redevenu "jambe mécannique". Chaque fois qu’il la lève c’est la France qu’il enfonce. Cinquante neuvième minute : pénalité réussie pour sanctionner le carton jaune de Betsen, 7/18. Soixante troisième minute : 3ème drop tenté et réussi par Wilkinson, 7/21. Soixante quinzième minute : hors jeu français suite à une chandelle ratée de Michalak. Et une cinquième pénalité réussie par Wilkinson qui fait carton plein, 7/24. Coup de sifflet final. Elimination de la France en demi-finale. Les rêves de finale tombent à l’eau. C’est la grande désillusion.
Equipe de France
N Brusque - A. Rougerie, T. Marsh, Y. Jauzion, C. Dominici (C Poitrenaud) - (o) F. Michalak (G. Merceron), (m) F. Galthié (cap) - O. magne, I. Harinordoquy, S. Betsen (C. Labit) - J. Thion, F. Pelous - S. Marconnet, R. Ibanez, J. J. Crenca (O. Milloud).