L’école, à mon avis du moins, a pour mission (1) de “normaliser” en termes de comportements sociaux des enfants de toutes origines, (2) d’éduquer, c’est à dire d’ouvrir à un certain nombre de valeurs, notamment dans les rapports aux autres et (3) d’instruire c’est à dire de faire acquérir un certain nombre de méthodes intellectuelles et de connaissances permettant notamment l ’insertion sur le marché du travail et l’acquisition des éléments de la culture d’un “honnête homme” (au sens voltairien du terme) de son époque. Ce classement n’a rien de hiérarchique mais entend simplement distinguer des fonctions différentes. Il montre l’imbécilité de certains débats relatifs au “pédagogisme” où à l’école, strict “lieu d’instruction”.
C’est dire que ses finalités sont, toujours à mon avis, intrinsèquement contradictoires: intégrer dans le marché du travail et former les citoyens d’une société démocratique d’un côté, “normaliser” et faire acquérir les éléments d’une culture qui donne envie de continuer à se cultiver de l’autre, éduquer et instruire, faire acquérir des données et des méthodes, …
Comme le montrait P. Bourdieu, l’école reste un outil de la reproduction sociale: les fils de cadres supérieurs deviendront, significativement cadres supérieurs, les fils d’employés arriveront significativement aux mêmes statuts que leurs parents. Elle n’est donc plus l’école républicaine de promotion sociale “au mérite” telle qu’elle a existé tant bien que mal jusque vers la fin des années 50. Au contraire, la mobilité sociale du fait de l’école a baisse (environ 10% de fils d’ouvriers et d’employés en Grandes Ecoles vers la fin des années 50, environ 3% aujourd’hui).
Notre école, sous couvert d’égalitarisme, massifie et est en fait uniformisatrice, accorde quasiment les mêmes moyens et utilise trop les mêmes méthodes quelles que soient les populations scolaires. Les ZEP (en train d’être supprimées) n’ont pas changé fondamentalement les choses faute de moyens supplémentaires. Or une des caractéristiques héritées de l’urbanisme des années 50-60 est dans le fait qu’il existe des quartiers (et donc des écoles) dans lesquels les difficultés sociales se cumulent. Ce qui suppose: (1) qu’on accorde infiniment plus de moyens à ces écoles et (2) que la société fasse infiniment plus d’efforts pour combler ces difficultés sociales. L’un ne va pas sans l’autre et on ne peut demander à l’école de réussir là où la société échoue.
Notre système scolaire reste élitiste et extrêmement ségrégatif. D’un côté, les écoles des beaux quartiers et celles des pires banlieues, ce qui se poursuit pour les collèges et les lycées, y compris avec le “privé” et le “public”. Arrivé au baccalauréat, les filières des “Grandes Ecoles” d’un côté (avec des budgets par étudiant de l’ordre du double de ceux des universités) et les universités réduites à la protion congrue.
Ce ne sont hélas pas les dites-“réformes” de X. Darcos, véritable mise en pièce du système pour éponger les déficits de l’état dûs notamment au “bouclier fiscal”, qui risquent de changer quoique ce soit à ces sombres données. La contestation qui monte et risque de continuer à monter chez les lycéens, les étudiants et les enseignants le montre.
- “La France continue de détruire plus d’emplois qu’elle n’en crée”. Le Monde.
- “Une cinquantaine d’écoles de Monpellier ont ouvert leurs portes aux parents d’élèves hier soir, dans le cadre d’une «Nuit des Ecoles» pour la défense de l’Education Nationale”. LibéMarseille.
- Médias, honnêteté et propagande, sur le blog “Monde en question“.
- Témoignages: être jeune et grec. Le Monde. Cela me rappelle quelque chose.
- Télévision publique. Le Monde. “En Europe, un seul chef d’Etat traite la télévision publique aussi mal que Nicolas Sarkozy : Silvio Berlusconi. Partout ailleurs, ce sont des instances indépendantes qui choisissent elles-mêmes les dirigeants. Ces télévisions, la BBC notamment ou la Télévision suisse romande, proposent les programmes les plus prestigieux, les plus talentueux, et les informations les plus indépendantes. C’est à ce monde-là que nous appartenons, et nous entendons bien y demeurer”. Voir aussi le post de Marianne : Bouygues l’a demandé, Sarkozy l’a fait..!
- “Le mécontentement gagne les présidents d’universités”. Le Monde. Tout ça commence à faire beaucoup…