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220° Allons voir chez les Grecs...

Publié le 10 décembre 2008 par Jacques De Brethmas

A l'insu de notre plein gré, nous abordons l'affrontement de deux mondes, deux modes de vie et de société, et cette manière que les médias ont de stigmatiser des « ultra-gauchistes » sans chercher ce qu'ils représentent, et en faisant semblant d'ignorer la lame de fond, le tsunami qui enfle sous leur agitation me déconcerte quelque peu. Ça va saigner au carrefour.

Alors que deux tiers de la planète crève la faim, et que plus de la moitié des habitants des pays riches a des fins de mois difficiles, on nous présente les premiers symptômes d'agitation comme le fait de « groupuscules d'ultra-gauchistes anarchistes », des sortes de râleurs qui ne veulent pas se contenter de pain sec et de coups de matraque, de temps de travail en hausse et de revenus en baisse, de promesses pas tenues et de richesses qui leur passent sous le nez. Des mauvais coucheurs, en quelque sorte.

On persiste à nous faire croire que le système cousu sur mesure pour 15% des habitants de la planète qui en possèdent 80% des richesses est le seul valable, et que l'opinion des 85% de laissés pour compte ne consiste qu'en un « ultra-gauchisme anarchiste groupusculaire » qui va se dissoudre dans la nature comme des mouches quand on agite une tapette devant quelques jets de lacrymogènes et un troupeau d'otages condamnés pour l'exemple..

Ben non !


Ces enfoirés qui nous gouvernent
envoyé par Mecanopolis

Il va falloir réviser jusqu'au vocabulaire, comme en mai 68 où ils nous disaient que nous n'étions « pas normaux » et qu'ils restaient cois lorsque nous répondions: « C'est quoi, la normalité »?

C'est quoi « l'ultra-gauchisme ».?

Flanquer les gens à la porte d'une entreprise qui gagne de l'argent pour faire plaisir aux actionnaires, c'est de la « droite ordinaire» ou de l' »ultra-droitisme »?

Parce que, pour le moment, il faut incendier une mosquée ou ravager un cimetière pour être qualifié d' »ultra-droitiste », et encore avec l'excuse d'être un peu dérangé et pas vraiment responsable de ses actes. (ce que je conteste; pas d'excuse...)

L'axe de la balance ne serait-il pas à mi-chemin entre les deux plateaux?

Dans les pays de l'est, on favorise le retour des religions pour canaliser l'agitation des masses, orienter leurs revendications vers l'au-delà et leur promettre un monde meilleur où la finance n'aura plus à les faire vivre.

Poutine et Medvedev sont venus en personne enterrer le patriarche Alexandre, grand homophobe devant l'éternel, grand cataplasme sur les revendications et les libertés, et lui faire un bisou sur le cercueil pour bien dérouler le tapis du pouvoir bien partagé avec son successeur. En se mettant ainsi le puissant culte orthodoxe dans la poche, ils évitent une situation à la polonaise façon Solidarnosc, qui est le seul exemple de l'histoire où une église n'était pas du côté du manche. Poutine est un ancien du KGB, on ne lui fait pas deux fois...

Est ce que ces belles manières suffiront à calmer l'attente des gens devant une vie meilleure que la planète pourrait leur offrir, mais dont les prive un quarteron de ploutocrates?

Regardons en France: il y a plusieurs semaines que de nombreux lycées sont occupés par les élèves et qu'on ne nous dit rien. Ce n'est que ce matin que, l'érection lycéenne devenant trop difficile à cacher, nous découvrons les choses dans les médias et à la radio. -Je n'ai pas encore regardé la télévision-.

En Grèce, il y a de mois que le bon peuple gronde, que les étudiants manifestent et que les voitures brûlent dans les banlieues. Qu'a fait le gouvernement? Rien. Et voilà que les choses explosent, comme elles ont explosé chez nous lorsque deux mouflets se sont fait électrocuter en fuyant la police.


L'Effet Sarkozy (Parodie Bénabar)
envoyé par Bradouchka

Sauf que les Grecs ont un sens politique sûrement plus affûté que le nôtre. Non content d'avoir inventé la démocratie, c'est un peu loin mais cela s'inscrit forcément dans les « gènes culturels » d'une nation, et de s'être libérés dans l'histoire de deux invasions, romaine et ottomane, les Grecs ont connu, il y a quarante ans, dix ans de dictature militaire à la suite du putsch du colonel Papadopoulos.

Le foyer de la contestation fut l'université d'Athènes en général, et l'école polytechnique en particulier, contre laquelle les colonels envoyèrent les chars en novembre 1973. Si l'école, qui n'était pas occupée que par ses étudiants, fut évacuée, ce fut le point de départ d'une insurrection qui alla en se généralisant et qui, s'additionnant à la crise chypriote, conduisit, de grandes manifs en grèves générales, au renversement des colonels fin 1974. L'actuelle constitution grecque date de 1975.

Les Grecs, eux, ont hérité de ces événements récents un vrai sens politique qui ravirait Hamon, Besancenot et Mélanchon... Les actions de rue auxquelles nous assistons ne sont pas que, comme chez nous, une rage de casser stérile et déstructurée. Ils savent ce qu'ils veulent et aussi comment l'obtenir, et s'il n'y a pas de séparation de l'église et de l'état dans ce pays, ce pauvre Caramanlis ne peut pas compter sur l'anesthésie de la religion pour calmer le jeu, celle-ci n'ayant de ramification politique qu'avec un parti d'extrème-droite, le LAOS, qui est au nombre de ses plus farouches opposants.

Nous n'avons donc pas fini d'entendre parler des Grecs, et il n'est pas aventureux de supposer que leur exemple pourrait faire tache d'huile en Europe, où le mécontentement est uniformément partagé.

D'ailleurs, comme je disais dans mon billet précédent, notre régime sent parfaitement gronder le mécontentement. A l'Elysée et place Beauveau, on est sur les charbons ardents, et ce ne sont pas quelques campagnes cultivant la parano et la peur du terroriste ultra-gauchiste qui vont dissoudre le mécontentement des braves gens devant l'inanité des mesures prises.

Alors que le nombre de SDF explose, parallèlement à l'explosion des radiations des Assedics, et que de plus en plus de familles ne savent plus quoi mettre dans leur assiettes, le régime prend des mesures pour les Français qui veulent acheter des voitures et des maisons.

Bien sûr, l'industrie automobile et le bâtiment font vivre des milliers de gens, mais quand il n'y a pas d'argent, les gens n'achètent pas, et ce ne sont pas quelques cadeaux bonux qui vont renverser la tendance.

Ceux qui peuvent acheter une voiture chaque fois que sort un nouveau modèle l'achèteront de toute manière et empocheront la prime de 1000€ dont ils n'ont pas besoin, et ce qu'il manque aux autres, ce n'est pas la prime de 1000€, mais les autres 10 000€ pour acheter le véhicule. Si on ajoute à cela que 63% de la production française est vendue à l'exportation, on constate que l'impact de cette prime est purement anecdotique!

C'est donc avec une mesure anecdotique que l'état veut relancer l'industrie automobile...




Lettre d'expulsion, Renan Luce.

Le constat pour le marché immobilier est à peu près identique: d'abord, ce n'est pas en favorisant l'accès à la propriété qu'on va loger les mal-logés. D'autant plus que les candidats à l'achat immobilier vont attendre bien au chaud le retour de crédits plus souples pendant que les pauvres, eux, continuent à attendre dehors.

En attendant, même les chanteurs s'emparent de la situation, ce qui est tout de même un signe qui ne trompe pas.

Alors, rangeons quelques paquets de pâtes dans le placard au cas où, et assistons au combat sans merci des coriaces et des affamés.

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