" La croyance en un monde invisible (une réalité supra-empirique), écrit-il dans son introduction, et la pratique de rituels collectifs qui s'y rapportent - c'est ainsi que je définirais la religion - accompagnent l'aventure humaine depuis des dizaines de milliers d'années. " De fait, l'auteur commence son récit historique à Qafzeh, un site proche de l'actuelle Nazareth, où une jeune femme et un enfant " proto-Cro-Magnons " furent enterrés dans une sépulture il y a cent mille ans, première preuve archéologique, pense-t-on, d'une croyance en un au-delà.
Dans un souci de neutralité revendiqué, indispensable à un tel ouvrage, Frédéric Lenoir ne s'attache à aucun parti pris idéologique tendant à prouver l'existence ou la non-existence de forces surnaturelles que les monothéismes appellent " Dieu ". Il s'intéresse au " comment ", ce en quoi il s'intéresse d'abord à l'Homme : " comment est apparu le sentiment religieux ? Quels sont les premières croyances et les premiers rituels ? Comment se sont-ils développés au fur et à mesure de l'évolution des sociétés et de la complexification de leur organisation ? Comment sont nées et se sont développées les grandes religions historiques ? ", telles sont les questions auxquelles le livre répond avec clarté.
Suivant une démarche chronologique, l'auteur aborde les religions originelles, liées à la
La démonstration globale est convaincante, comme l'est aussi une autre mise en perspective décrite par Frédéric Lenoir : le fait que, dans des régions du monde éloignées les unes des autres, les sociétés humaines se sont posées les mêmes questions aux mêmes moments, qu'il se soit agi de la notion de sacrifice - une forme d'échange avec la ou les divinités - ou l'apparition de codes éthiques fondamentaux. Etrangement, avec la prise de conscience environnementale et un certain " retour à la nature ", alliés au sentiment d'autonomie de la personne, on voit aujourd'hui apparaître deux mouvements assez inattendus, mais l'évolution des religions n'est pas linéaire et sa dimension humaine la rend protéiforme. En parallèle avec les aspirations intégristes issues d'un retour aux sources mal compris, l'un serait une quête de spiritualité qui s'affranchirait des Eglises et de leurs doctrines en net décalage avec les aspirations humaines à la liberté, une sorte de " religion à la carte " où les préoccupations spirituelles et éthiques l'emporteraient sur les dogmes figés et les sermons moralisateurs. L'autre mouvement s'orienterait vers un retour aux cultes primitifs, à travers un néochamanisme qui, pour répondre à une quête spirituelle, n'en présente pas moins une certaine artificialité : " Là où l'initiation traditionnelle est l'œuvre d'une vie, souligne l'auteur, on la voit désormais s'offrir en cursus de dix ou douze cours, assortis de séances de perfectionnement. [...] Ces enseignements n'ont donc d'ancestral que l'étiquette dont ils se parent. Ils témoignent toutefois d'une insatisfaction profonde, d'un besoin de sacré chez les Occidentaux que le carcan des religions historiques telles qu'elles se sont constituée au fil de l'histoire ne suffit plus à assouvir. "
Un seul domaine ne fait l'objet d'aucune présentation, alors qu'il constitue une composante
Illustrations : Frédéric Lenoir - Menhir (carte postale) - Vénus de Laussel.
À propos de T.Savatier
Ecrivain, historien, passionné d'art et de littérature, mais aussi consultant en intelligence économique et en management interculturel... Curieux mélange de genres qui, cependant, communiquent par de multiples passerelles. J'ai emprunté aux mémoires de Gaston Ferdière le titre de ce blog parce que les artistes, c'est bien connu, sont presque toujours de mauvaises fréquentations... Livres publiés : Théophile Gautier, Lettres à la Présidente et poésies érotiques, Honoré Campion, 2002 Une femme trop gaie, biographie d'un amour de Baudelaire, CNRS Editions, 2003 L'Origine du monde, histoire d'un tableau de Gustave Courbet, Bartillat, 2006 Courbet e l'origine del mondo. Storia di un quadro scandaloso, Medusa edizioni, 2008