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Interview de Dominique Belluard, vigneron en Haute-Savoie et expert és-Gringet

Par Ochato

Dominique Belluard Dominique, parles-nous un petit peu du Gringet, quelles sont les dernières nouvelles du front?

Il y a deux ans, un micro-biologiste suisse a réalisé un séquençage ADN du Gringet. Il est arrivé à la conclusion que celui-ci n’était ni un Traminer, ni un Savagnin.  Selon lui, il s’agirait plutôt d’un dérivé de l’Altesse. Voilà où l’on en est aujourd’hui, je n’en sais toujours pas plus !

Combien êtes-vous à le cultiver ?

Il en subsiste 22 Ha, j’en cultive 12. Je suis le plus gros domaine, on tombe ensuite à 3 Ha, 1,5 Ha, 1 Ha…ensuite, ce sont de petits vignerons amateurs qui bossent sur des parcelles de quelques centaines de métre carré, pour le fun.

Qu’est-ce qui te plaît dans ce cépage ?

Tout d’abord, je n’ai pas eu le choix, je suis tombé dedans ! Ensuite, j’essaie d’en tirer le meilleur parti. J’ai fait des essais avec le bois, ça ne lui convenait pas trop…Il est beaucoup plus adapté aux cuves béton !

C’est une expression aromatique difficile à récupérer ?

C’est comme pour n’importe quel cépage, le boulot se fait dans la vigne. Une fois ce travail effectué, bien sûr, il faut surveiller la vinification…mais personnellement, je suis très fainéant à ce niveau !

Est-ce un cépage sensible ?

Oui, il est assez sensible au Mildiou. Il faut dire que cultiver de la vigne en Haute-Savoie est assez extrême, le raisin est soumis à rude épreuve. Après, les choses se déroulent plus ou moins bien selon les millésimes. Je n’ai pas trop de problèmes de pourriture, car le climat est assez froid…Oui, le plus gros danger reste le Mildiou. Je suis situé dans une vallée, et même si je suis en Haute-Savoie, nous sommes aussi victimes de la pollution. Je crois que c’est un problème grandissant pour tous les vignerons.

Parles-nous un peu de ta cuvée « le feu »

"Le feu », c’est très  particulier. Ce sont des parcelles exposées Sud-Est, les meilleures expositions selon moi, qui permettent une maturité précoce ; et surtout, géologiquement, tu es sur des argiles rouges chargées en bauxite, donc en alumine et en oxydes de fer. Ce type de sol est un enfer à travailler : si le climat est humide, tu te retrouves avec de l’argile à potier, s’il est sec, ça devient du béton. Il faut vraiment choisir le bon moment pour les labourer, mais ce type de sol procure une puissance et une minéralité de folie.

Depuis que tu es passé en biodynamie, peux tu déjà percevoir une évolution de ton domaine ?

Je vois déjà des changements au niveau des sols, de leur bio-diversité, de leur fertilité, ils commencent à revivre. La faune et la flore reviennent également, elles sont plus présentes, plus diversifiées. Je m’étais vite rendu compte qu’avec l’usage de produits chimiques, tu perdais purement et simplement ton terroir. Travailler en biodynamie, cela signifie remettre du vivant dans tes vignes, tu vois ainsi réapparaître des espèces, végétales comme animales, qui avaient disparu. Pour moi, le choix du bio signifie gagner de la fertilité pour demain. Plus tu vas loin dans ta démarche en biodynamie, en terme de qualité de travail, de vigilance, et plus ton terroir est gagnant, chaque année. J’en suis à 7 ans, mais il est certain que conduire un domaine en biodynamie pendant 20 ans t’amènera des résultats incroyables. Cela représente beaucoup de travail, mais tu travailles pour demain.

Propos recueuillis par Christophe suite à la dégustation organisée mi-novembre aux "Noces de Jeanette"


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