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L’ostentatoire est-il encore durable ?

Publié le 08 décembre 2008 par Alex Gaudin

Connaissez-vous Thorstein Veblen ? Cetéconomiste et sociologue américain, écrit en 1899 un ouvrage visionnaire, Théorie de la classe de loisirs, récemment réédité (écrit tout petit et dense...) par Gallimard.

Veblen se penche sur ce qu’il appelle la « consommation ostentatoire ».

Son analyse est la suivante :

Partant du principe que le grand ressort de la propriété privée, avant même l’usage qu’on en fait, c’est la distinction sociale, Veblen postule que la distinction doit susciter l’envie.

La propriété devient alors la preuve facilement reconnaissable d’une estimable réussite.

Posséder, en somme, pour jouir d’une belle réputation.

Mais encore faut-il pouvoir mettre en scène et valoriser ces richesses symboles de réussite et de pouvoir.

C’est ici qu’intervient l’idée de loisir ostentatoire.

Veblen entend par loisir, la consommation improductive de temps, laquelle souligne d’une part le sentiment d’indignité du travail (cf. les Grecs), et d’autre part témoigne de la possibilité de s’offrir une vie d’oisiveté.

Le loisir ostentatoire, c’est donc toutes ces activités qui visent à démontrer l’impérieuse absence de nécessité d’avoir à travailler. Dans la bourgeoisie, cette « tâche » était déléguée traditionnellement à la gente féminine.

Gaspiller du temps est une chose, mais on peut aussi gaspiller le temps de travail de l’homme.

C’est le rôle des domestiques que de montrer que leur maître peut payer des salaires.

L’utilité sociale des domestiques consisterait donc pour l’essentiel à faire bien voir qu’ils sont exempts de travail productif, signifiant par là la capacité du maître à payer des gens à ne pas faire grand-chose. Et donc à signifier sa richesse et sa puissance.

Si le gaspillage de temps apparaît donc une forme précieuse de distinction, l’autre grand ressort de l’ostentation analysé par Veblen est celui de la consommation, qu’il assimile au gaspillage des biens.

A l’égal du Potlach de Mauss qui incarne la capacité à offrir toujours plus que l’autre, et donc à sacrifier sur l’autel de la reconnaissance quantité de biens, Veblen voit dans la consommation ostentatoire le levier moderne qui va permettre aux puissants d’affirmer leur supériorité.

A cet égard, la période des grands palaces du début du 20e siècle et de leur clientèle aristocratique montre bien le glissement du loisir aristocratique vers une envie bourgeoise de consommation ostentatoire.

Consommer de façon ostentatoire est ainsi devenu un loisir en soi.

Et vous, vous en voyez parfois des exemples de consommation ostentatoire autour de vous ?


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