Identifiez-vous l'auteur du crime ?
Interrogeons les complices.
J'appelle mon avocat.
En prison.
Que se passe-t-il si l'on fait rentrer dans une garde à vue, un peu d'informatique, de mathématiques et de logique ?
Identifiez-vous l'auteur du crime ?
Derrière une vitre fumée, le témoin oculaire regarde précisément les individus numérotés qui sont devant lui. Se souvient-il correctement de la scène, des détails ? Ce qui lui est dit va-t-il influencer son choix ? Ces questions relèvent de la psychologie scientifique. La modélisation des comportements associés peut paraître surprenante au néophyte, elle existe pourtant et s'appelle WITNESS. Les modèles mathématiques et de simulation réalisés pour la psychologie du témoignage vont permettre de mieux la théoriser et de comprendre plus profondément les mécanismes qui rentrent en jeu.
L'article du CNRS "L'ordinateur, les mathématiques et le témoin occulaire"
Interrogeons les complices.
La séparation d'éventuels complices et leur interrogatoire séparé, les placent souvent dans la situation que l'on appelle "le dilemme du prisonnier" bien connu dans le domaine des mathématiques qui s'appelle la théorie des jeux. Le dilemme du prisonnier est le point de départ de nombreuses variantes plus complexes de ce jeu .
La version originelle est la suivante :
Deux suspects sont arrêtés par la police. Mais les agents n'ont pas assez de preuves pour les inculper, donc ils les interrogent séparément en leur faisant la même offre. « Si tu dénonces ton complice et qu'il ne te dénonce pas, tu seras remis en liberté et l'autre écopera de 10 ans de prison. Si tu le dénonces et lui aussi, vous écoperez tous les deux de 5 ans de prison. Si personne ne se dénonce, vous aurez tous deux 6 mois de prison. »
En fait le choix des deux hommes va s'effectuer dans une recherche de choix personnel favorable, ce qui n'est pas la solution optimale. Ils se dénoncent le plus souvent l'un l'autre, ayant trop peur d'écoper de 10 ans de prison alors que l'autre resterait en liberté.
Le dilemme du prisonnier interpelle sur ce qui relève des conditions de coopération entre les individus. C'est un domaine tout a fait mathématisable en terme de probabilités de gain ou de pertes, il est donc modélisable assez "facilement".
Sous quelles conditions des acteurs ( de la théorie des jeux ) vont-ils choisir la coopération plutôt que la trahison Cette question est d'autant plus importante que les réseux sociaux se développent de façon exponentielle avec Internet. Il est donc intéressant de connaître un indicateur de coopération maximale par exemple. Il semble qu'une taille critique du réseau social de cooépration apparaisse, elle serait de 50 personnes, la "Goldilockszone" et se formerait autour d'un maître d'influence. La configuration suivant serait donc optimale en terme de coopération: les individus se répartissent par grappes d'une cinquantaine de personnes se connaissant et qui s'est agrégée à partir d'un influenceur. Chaque acteur qui joue bien peut à son tour en influencer d'autres à coopérer. La seule façon d'un coopérateur de survivre est de former un groupe de coopérateurs. Si le réseau social est trop petit ou trop grand, la trahison envahit rapidement les acteurs.
L'article en Anglais de SciencesNews
En parcourant l'article Le dilemme du prisonnier de Culturemaths, on en apprend un peu plus sur les "règles" de la coopération :
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Certaines études ont montré que les femmes coopèrent davantage que les hommes.
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Chez des enfants âgés de 6 à 11 ans, on a observé un taux de coopération (c’est-à-dire un pourcentage de sujets optant pour la coopération) qui augmente avec l’âge, un résultat suggérant, en conformité avec certains principes de la psychologie de l’enfant, un apprentissage progressif des normes sociales de coopération.
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L es étudiants en économie sont moins coopératifs que les autres !
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Les étudiants anglo-saxons coopèrent moins que les autres.
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Les traits de personnalité influencent le comportement face au jeu.
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Les autistes ne se comportent pas différemment des sujets « normaux », mais ont une perception très différente du jeu.
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La communication entre les joueurs renforce la coopération.
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La coopération est plus forte lorsque les sujets se connaissent et partagent un esprit de groupe.
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L’introduction d’un mécanisme de sanction peut renforcer la coopération, même si elle a parfois des effets pervers en introduisant une suspicion entre les joueurs qui peut inhiber certains comportements coopératifs.
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La pression sociale (pression par les pairs) est un mécanisme incitatif à la coopération particulièrement puissant.
J'appelle mon avocat.
Il ne serait pas surprenant que la garde à vue se termine en procès. Or pourquoi ne pas essayer de trouver une plaidoirie gagnante à tous les coups: qu'elle soit celle de la défense ou de l'accusation? Comment trancher dans ce cas puisque sur des faits identiques, les arguments avancés peuvent l'être à charge ou à décharge. Un tel procès n'existe pas? Si bien sûr c'est celui de Protagoras contre son élève Euathlus qui aboutit au paradoxe de l'avocat.
En prison.
Et du procès à la prison, il n'y a qu'un pas...Des mathématiciens en prison, impossible n'est pas ? Non, pas du tout. Il existe quelques exemples célèbres
Le célèbre Galois a écopé de 6 mois de prison pour port illégal d'uniforme et port d'armes prohibé : ICI
Theodore John Kaczynski surnommé Una-Bomber a été mathématicien et terroriste.
Libri, mathématicien et bibliophile italien, est tristement célèbre pour le vol de plus de 30 000 pièces aux bibliothèques françaises. Il fut condamné par contumas après s'être enfui à l'étranger.
Si vous en connaissez d'autres, je suis preneur !
Pour compléter :
L'histoire de la psychologie scientifique, cours de Claude Bonnet Université Louis Pasteur en PDF : 1 2 3