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La leader du PS doit désormais affronter le plus difficile : redéfinir son identité publique.
L'arrivée de Martine Aubry à la tête du PS intervient dans une conjoncture faite d'un risque et d'une chance.
Le risque, c'est l'existence d'une crise profonde multiple.
Cette crise va tester les leaders politiques Français dans plusieurs domaines :
- leur capacité d'analyse de la situation,
- leur capacité à énoncer des propositions positives, concrètes, réalistes pour sortir de la crise ou du moins en atténuer les impacts immédiats les plus redoutables,
- leur ouverture au changement pour que les leçons de la crise soient tirées.
La chance, c'est que la crise entraîne une incontestable crise des valeurs libérales et un retour en forme de l'Etat ; ce qui entraîne une forme de gauchisation des repères de l'opinion.
Ce contexte exceptionnel ouvre à Martine Aubry des perspectives inespérées il y a encore quelques mois.
Elle doit désormais clarifier son positionnement.
Pour l'instant, dans l'opinion, elle d'abord celle qui s'est opposée à Ségolène Royal. Si elle reste à cette étape réductrice, l'avenir s'avère délicat.
Il lui faut donc ouvrir rapidement de nouvelles étapes faites d'attrait, de crédibilité, d'originalité.
L'attrait, c'est l'adéquation à répondre aux préoccupations et aux attitudes attendues par l'opinion.
La crédibilité, c'est la capacité à énoncer des propositions qui ne soient pas en contradiction avec les actions passées, la carrière et la personnalité profonde d'un responsable public.
L'originalité, c'est la " dernière touche " d'un bon positionnement qui devient distinctif. C'est ce qui permet de considérer qu'un leader est seul à posséder certaines qualités ou du moins qu'il les possède à un plus haut degré que les autres.
Pour ancrer son positionnement, Martine Aubry doit mener trois études parallèles :
- celle de son image actuelle,
- celle des aspirations du corps électoral,
- celle de ses principaux concurrents.
Or, l'analyse du positionnement de ses concurrents montre que de très nombreux créneaux sont déjà occupés.
La social-démocratie est devenu le créneau de Ségolène Royal.
L'incarnation de la " gauche populaire " est celui de Benoît Hamon voire bien davantage celui de Jean-Luc Mélenchon à l'extérieur même du PS.
Le créneau de la "gauche efficace" est occupé par Bertrand Delanoë qui est resté à l'écart de l'équipe de Martine Aubry comme si être n° 2 était un défaut irrémédiable. Il peut même être occupé demain par Dominique Strauss-Kahn si ses démêlés sur sa vie privée n'occultent plus le reste.
Le créneau de Martine Aubry demeure celui de son ancrage initial : la "gauche technocratique" qui met l'autorité au service d'une justice sociale déclarée.
Ce n'est pas le positionnement attendu par l'opinion.
Elle va donc devoir désormais " se repositionner " par de nouvelles actions.
La réussite de Martine Aubry dépendra du succès de ce repositionnement, de sa capacité à faire vivre, jour après jour, sa nouvelle identité publique.
L'échec partiel ou complet du marché ne réhabilite pas pour autant les anciens instruments de la régulation étatique.
On pressent que l'avenir sera plus complexe.
A ce jour, on ne voit pas les germes d'un renouveau de la pensée de gauche. Où sont les intellectuels ou les leaders qui travaillent à autre chose qu'à leur propre thèse ou à des projets gestionnaires d'équipes de présidentiables ?
Le libéralisme a baissé mais le socialisme n'a pas remonté.