Le conseil de l’europe veut gifler la fessée
La Fessée de Paul Marie. (kiknok's photostream / Flickr)
L’organisation, qui compte 47 pays, va lancer une campagne pour «changer les mentalités» sur les châtiments corporels aux enfants.
Par CHARLOTTE ROTMAN - http://www.liberation.fr
QUOTIDIEN : samedi 4 août 2007
Faut-il interdire la fessée? Le Conseil de l’Europe bataille pour l’abolition de ce qu’il nomme «les châtiments corp orels» dans les 47 pays qui le composent. Il s’appuie sur
deux «recommandations», non contraignantes, datant de 2004 et de décembre 2006. Et s’apprête à lancer à l’automne une vaste campagne de sensibilisation «pour changer les
mentalités». Le terme de «châtiment corporel», qui sent la trique et le martinet, englobe également. la fessée. Celle, par exemple, que les parents français ont tout à fait le droit
de délivrer à leur enfant. Actuellement, seuls seize pays interdisent ces gestes à l’école, mais aussi à la maison. La Suède fut la pionnière en 1979. Si nul n’a envie de justifier de
sévères raclées, l’initiative du Conseil, pétrie de l’idéologie de la protection de l’enfance et de celle des droits de l’homme, risque de culpabiliser (au moins en France) des générations de
parents.
«Devoir». C’est l’un des chevaux de bataille de la secrétaire générale adjointe du Conseil de l’Europe, Maud de Boer-Buquicchio. Lors de la 28e conférence européenne des
ministres chargés des Affaires familiales, en mai 2006, la Néerlandaise défendait cette abolition, en invoquant le «devoir de protéger l’intégrité physique et psychologique» et «la
dignité humaine de nos enfants». «Nous ne sommes pas autorisés à les frapper, les blesser et les humilier. Un point c’est tout. [.] Nous devons changer de mentalités et adapter nos
lois en conséquence.»
En réalité, le Conseil prône en la matière la «tolérance zéro»: ni baffe, ni tape, ni claque, qui sont assimilées à des «mauvais traitements», des «humiliations» et
autres «mutilations». Et, surtout, «aucune religion, croyance, situation économique ou méthode éducative» ne saurait les justifier. Ainsi, le commissaire aux Droits de
l’homme, Thomas Hammarberg, dénonce-t-il les «concepts juridiquement déshonorants» de «châtiment raisonnable» et de «correction licite». Le Conseil de l’Europe se
veut néanmoins rassurant: «Interdire les châtiments corporels dans le foyer familial ne veut pas dire engager des poursuites contre les parents, mais changer leurs comportements.» Des
poursuites, il y en eut pourtant. Ainsi, en 1998, la Cour européenne des droits de l’homme sanctionnait un Britannique qui avait battu son beau-fils. Au Royaume-Uni, la justice avait justement
considéré qu’il s’agissait là d’un «châtiment raisonnable».
Liens. On trouve d’autres fers de lance dans cette croisade, qui est loin de se jouer au seul sein des institutions. La psychanalyste et philosophe Alice Miller
popularise depuis trois décennies l’idée qu’il n’y a pas de bonne fessée. Que la violence à l’égard des enfants génère la violence chez les adultes. En enregistrant le «message
erroné», selon lequel «les enfants sont frappés pour leur bien», les parents nient la souffrance et enseignent le recours à la violence. «Les sanctions entraînent une
obéissance à court terme, mais, à plus long terme, engendrent la peur, souvent déguisée en agressivité, soif de vengeance, haine, volonté d’être enfin au pouvoir, pour punir les plus faibles.
Elles conduisent à un cercle vicieux», déclarait-elle à Libération, en 1999, lors de la création de l’association Eduquer sans frapper.
De son côté, après une recherche dans plusieurs services de traumatologie d’urgence auprès de 300 adolescents, le médecin Jacqueline Cornet a établi qu’il existe un lien entre «la
violence éducative» subie et la propension à avoir des accidents.
Toute cette littérature se retrouve sur le site de l’association Ni claques, ni fessées , laquelle fait circuler une pétition pour la promulgation d’une loi «qui dise le droit de
l’enfant à être élevé sans claques ni fessées, et le devoir du parent contrevenant de se faire aider dans sa tâche éducative».
Lors de sa prochaine campagne, le Conseil de l’Europe devra donc convaincre la majorité de ses membres qu’une tape sur la main ou une fessée sur la couche, comme la raclée au ceinturon, est
toujours «un engrenage vers la violence». Au risque de diaboliser les parents et de brouiller le message.
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