Paris, le 5 décembre 2008 - A l’issue du Conseil des ministres de l’environnement européen, Greenpeace exprime sa déception face au manque de volonté politique des Etats Membres de l’UE pour protéger les forêts tropicales. La déforestation est pourtant responsable de 20% des émissions mondiales de gaz à effet de serre et contribue à la perte massive de biodiversité au niveau mondial. De son coté, la France continue d’agir à contre courant et entend favoriser les industriels plutôt que d’agir pour la protection des forêts et la lutte contre le réchauffement climatique.
La France souhaite en effet permettre aux industries européennes de continuer à émettre des gaz à effet de serre au nom de la lutte contre la déforestation. Le principe est simple : donner le droit aux industries polluantes de se soustraire à une partie de leurs obligations en matière de réduction des émissions, en échange d’investissement dans des projects forestiers.
« Hier, la France, qui assure actuellement la présidence de l’Union Européenne, et certains états membres dont l’Espagne ont soumis à l’approbation des ministres de l’environnement un texte favorable à l’introduction de crédits forêts dans le marché d’échange de quotas d’émissions (EU-ETS), ce qui permettrait aux industries polluantes en Europe de se soustraire à une partie de leurs obligations en matière de réduction des émissions de carbone », explique Grégoire Lejonc, chargé de campagne forêt de Greenpeace France. « Or, pour espérer lutter efficacement contre les changements climatiques, il faut à la fois réduire les émissions de gaz à effet de serre d’origine industrielle et celles issues de la déforestation. Il faut faire les deux, et non substituer l’une à l’autre ».
Cette proposition de la France a cependant été repoussée pour le moment. Le Conseil de l’UE a décidé de laisser du temps au temps, et a renvoyé le dossier auprès de la Commission Européenne qui s’est jusqu’à présent opposée, à juste titre, à l’inclusion des forêts dans les marchés carbone Dans une récente Communication aux Etats membres, la Commission a préconisé la création « d’un méchanisme global pour le carbone forestier » et l’utilisation de financements publics pour lutter contre la déforestation. Sur ce dernier point, les états membres de l’UE ont refusé hier de prendre des engagements contraignant concernant l’utilisation des revenus générés par la vente des quotas d’émission aux entreprises sur le marché carbone. La Commission et le Parlement Européen demandent à ce que ces fonds soient réinvestis dans la lutte contre les changements climatiques et la déforestation. « Aujourd’hui, l’Allemagne via sa Chancelière Angela Merkel, est le seul pays de l’Union Européenne à s’être engagé à utiliser, à partir de 2013, 500 millions d’euros par an, générés par le marché du carbone pour protéger les forêts tropicales. De son coté, la France n‘a toujours pris aucun engagement en ce sens, en dépit des bonnes paroles de Jean-Louis Borloo sur la préservation des forêts et du climat » dénonce Grégoire Lejonc.
Le Ministre français de l’Environnement doit se rendre la semaine prochaine à Poznan en Pologne pour participer à la Conférence Internationale sur le Climat. « La planète a désespérément besoin des réductions des émissions liées à une baisse de la déforestation tropicale, qui s’ajoutent, et non se substituent, aux réductions d’émissions liées à l’activité des pays industrialisés. En optant pour la substitution, et donc en minimisant la portée de ses engagements futurs de réduction, la France se rapproche malheureusement des pays qui cherchent à minimiser la lutte contre les changements climatiques » explique Jérôme Frignet, chargé de campagne forêt de Greenpeace France, présent actuellement à Poznan.
« Dans le cadre des négociations internationales, Greenpeace demande aux gouvernements d’entériner sa proposition « Forêts pour le Climat », qui vise à mettre un terme rapide à la déforestation, en utilisant des financements en provenance des pays développés, proportionnels à leurs quotas d’émission. En évitant le lien direct avec le marché du carbone, on évite le problème de la compensation des émissions et donc de l’affaiblissement des engagements de réduction des pays industrialisés, tout en disposant de la flexibilité nécessaires à la sauvegarde des droits des populations forestières et de la biodiversité », conclut Jérôme Frignet.