Milk, c’est encore surprenant, tire justement parti de la bicéphalité de son auteur. En en gardant le meilleur. Portrait épique, lyrique même, des 8 dernières années du militant politique gay Harvey Milk dans les années 70, le film joue impeccablement la carte de la grande émotion. Musique dans le ton de Danny Elfman, ici enfin épurée de ses tics elfiques, incarnation oscarisable de Sean Penn, grand biopic sentimental à l’américaine, mais d’une Amérique qu’on aime. D’une Amérique qui a le cœur à la bonne place, qui a le combat noble et le cinéma en miroir galvanisant.
Mais derrière le grand film classique, il y a aussi la patte Van Sant. Celle qui nous enflamme, qui nous touche droit au cœur, qui nous élève un peu. Il y a la photo d’Harris Savides, le DOP enfin retrouvé de son immense trilogie existentielle (Gerry, Elephant, Last Days), qui caresse chaque scène d’une lumière douce, presque fanée, épousant sensuellement les détails des corps lors de scènes charnelles, magnifiant le combat politique en lui donnant visage humain. Il y a encore ce montage d’archives et de photo d’époque, sans cesse intégrées au récit, comme pour lui donner plus de poids, comme pour sans cesse rappeler la vérité et l’importance de ce combat pour la tolérance, pour la différence. Il y a enfin cette justesse de rythme, ces scènes toujours de la bonne longueur, sans fausse pudeur, sans complaisance et ce regard aussi utopique qu’il est honnête d’un réalisateur totalement en phase avec son sujet.
Non, décidemment, Milk, c’est vraiment le meilleur des deux mondes.