France-Libye : Effets « boomerang » d’un coup de com’ trop réussi

Publié le 03 août 2007 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com

Editorial RELATIO par Daniel RIOT

Raison d’Etat ? Tout le monde comprend, même si cela rime souvent avec déraison d’Etat… Bataille entre marchands d’armes pour tirer parti du marché libyen, il y a. La France qui fait une partie de son beurre avec des canons signe de « gros contrats » avec Kadhafi. On se pince le nez et on oublie la morale. Soit. EADS confirme des contrats négociés depuis longtemps, presque conclus en février 2004, et  il n’y a plus d’embargo sur les ventes d’armes en Libye depuis 2004. Il n’y aurait donc que peu de choses à en dire…sauf sur le moment et les conditions de l’annonce.

« Affaires » d’Etat ? C’est déjà plus trouble et plus troublant… Le secret d’Etat devient cachotterie sale avec les lignes rouges de l’inadmissible franchies la plupart du temps. Certes, comme disait un ancien ministre travailliste, «  Tous les pays et tous les régimes ont  des cadavres dans leurs placards », mais il y a des degrés en tout, y compris dans l’horreur. Ou le cynisme et la manipulation.

Mensonges d’Etat ? On ne les compte pas. C’est d’ailleurs l’une des faiblesses des démocraties et l’une des raisons du discrédit de la politique. Les régimes totalitaires reposent sur des mensonges institutionnalisés. Les démocraties, elles, se fondent, en théorie,  sur le principe de réalité, donc de vérité, de transparence, de franchise. Surtout quand les détenteurs du pouvoir ont mis  à leur programme, une « République irréprochable »…

Que la polémique sur les contrats libyens s’amplifie est dans l’ordre du normal et de la logique. D’autant plus que l’opération « Sauvetage à Tripoli » a  d’abord été une « opération » de communication, comme Sarkozy sait les construire et les mener. « Retour de bâton »,  dit le Monde. « Une opération de com’ qui a mal tourné », constate Libération. C'est plutôt un choc en retour d'un coup de com' trop réussi et trop fêté, avec ostentation et précipitation.

Une tempête de sable ? Des doutes et des soupçons bien compréhensibles. D’autant plus que les déclarations officielles faites par l’Elysée ou des ministres (Kouchner, Morin…) ne démontrent rien comme tout ce qui vise à trop... démontrer.

Crédibilité internationale recouvrée ou non, Kadhafi n'est  pas  un chef d’Etat « normal »… onne doit pas traiter avec lui avec avec un honnête homme. On ne doit surtout pas oublier que les soigants bulgares ont d'abord été victimes d'une "prise d'otages d'Etat". Qui est plus est, les concessions françaises n’engagent pas que la France, mais l’Union européenne et, au-delà, la « communauté internationale ». Et les propos du fils de Kadhafi au Monde, même  inspirés par des considérations de politique intérieure libyenne, confirment surtout que l’Etat voyou utilise encore des méthodes de voyous.

Le PS réclame une mission d’enquête parlementaire. Il est dans son rôle, même si en matière de politique africaine il n’a guère de leçons à donner. Le problème c’est que dans la législation actuelle, ce type de commission n’a guère de pouvoirs d’investigation. Saura-t-on sur ce point s’inspirer de ce que peut faire la Congrès américain ? Il est plus que temps…Mais Sarkozy, sur des dossiers tels que celui de la Libye, le président en serait la première victime. En plein « état de grâce »…

Daniel RIOT