Un aventurier vagabond et cynique, parti à la recherche d’une mule chargée d’or… La psychologie et les manières du nouveau “Prince” de Perse, imaginé par Ubisoft pour les consoles de la nouvelle génération, tranche avec celles d’un gentilhomme. Mais tel un nouveau Sinbad, antihéros de piètre condition, le personnage principal apporte, par son ironie, une nouvelle fraîcheur à une saga initiée il y a près de vingt ans, sur Apple 2.
Dans la première partie du jeu, les scénaristes ont habilement su distiller l’humour, qui fait la saveur de nombreux contes orientaux. Prince of Persia est ainsi bien plus abouti, dans ces choix narratifs, que son prédécesseur Assassin’s Creed. Les concepteurs ont aussi adopté des ressorts de la comédie, en choisissant peu de personnages. Le duo constitué par le héros et Elika, princesse courageuse et effrontée, alimente, par leurs facéties, le comique de situation.
Mais après les premières explorations, la quête principale prend vite un tour mystique, une lutte du bien et du mal, qui déteint jusque sur l’esthétique globale du jeu. Les paysages de sables, les temples majestueux, laissent place à des niveaux immenses, mais sans véritable identité.
Cette comédie minimaliste, contrepoint des derniers épisodes de la série, bien plus sombres, n’a qu’un but : ne pas perturber le jeu d’acrobate, qui constitue l’essentiel de la mécanique de ce nouveau Prince of Persia. Course contre les murs, salto improvisé sur des barres de bois… Le jeu révèle, au fil du scénario, des combinaisons d’acrobaties de plus en plus complexes, et bien chorégraphiées. L’alchimie est également bonne, dans l’exécution des sauts, entre l’assistance, et la sensation de liberté.
Pour accentuer l’impression de vitesse et de fluidité, les réalisateurs ont aussi créé un monde semi-ouvert. Grâce à la recherche des sphères de lumières, les niveaux, mis sens dessus-dessous, montrent également une assez grande profondeur.
La richesse des interactions avec le décor compense toutefois difficilement l’absence d’une réelle opposition. Si le héros, sans cesse régénéré par son acolyte, est finalement immortel, les combats, mâtinés de quick time events, sont trop rares pour être prenants. Face à des ennemis stéréotypés, le joueur ne peut guère éprouver la fine lame du Prince de Perse. Il est dommage, que les scénaristes aient si peu développé les combats, quand un Soul Calibur, version aventure, semblait à portée.
Ce Prince of Persia fait également l’économie d’un autre pilier fondateur de la série : la réflexion. Au prix d’un accès au plus grand nombre, les énigmes sont réduites à la portion congrue.
Laurent Checola
Crédits : Ubisoft