Avant toute chose, je précise que je parle ici du caveçon standard, ou « caveçon ibérique », mais certainement pas de l’abjecte chaîne de vélo placée bas sur le nez et hélas encore utilisée en Camargue ou dans certaines parties de l’Espagne.
Cela étant dit, je peux maintenant faire mon apologie du caveçon.
Un caveçon, c’est quoi ?
Le caveçon est conçu comme un licol, c’est-à-dire sans embouchure. Mais la partie qui entoure le chanfrein est munie d’une pièce de métal entourée de cuir ou rembourrée avec du mouton. En général, trois anneaux y sont fixés, un au milieu sur le dessus, et un de chaque côté.
Il se met bien ajusté pour éviter de tourner, et se place comme une muserolle française, c’est-à-dire pas trop haut, pour ne pas perdre son efficacité, et surtout pas trop bas, pour ne pas être trop sévère (voire carrément douloureux).
Un caveçon, pourquoi faire ?
Autrefois, on utilisait le caveçon en préalable à l’embouchure pour débourrer les poulains, l’usage s’est un peu perdu en cour de route, mais tend à revenir. Mais surtout, surtout, l’emploi du caveçon devrait être systématique pour le travail à la longe !
Arrêtons-nous cinq minutes sur notre position à cheval et regardons nos mains. Sont-elles liantes, justes, souples, accompagnant chaque mouvement sans à-coup pour la bouche du cheval ? Parfois oui, mais la plupart du temps encore, pas assez ! Et chaque à-coup que prend le cheval est une sanction immédiate sur une partie particulièrement sensible : la bouche. Ainsi la langue, les commissures, voire même le palais et les barres sont soumis à des chocs répétés.
Alors imaginez ces mêmes chocs amplifiés par le travail à la longe directement sur l’embouchure. Huit à dix mètres de lourde « plate longe » au bout desquels se trouve 50 à 90 kilos d’humain. Chaque action, faute de main se voit amplifiée par notre poids, la longueur de la longe… Et pire encore quand le cheval se pique d’un envie de bonds, il est alors directement accroché à tout ce point par sa bouche. Aïe n’est-ce pas ?
La bouche d’un cheval est à préserver, car tant que nous montons avec une embouchure, c’est une partie capitale du dialogue avec le cheval qui s’y déroule. Abîmer une bouche, c’est la rendre douloureuse et insensible à la main. Et c’est s’éloigner de la légèreté, quelle que soit la discipline que l’on pratique.
Alors en attendant d’avoir la main parfaite à cheval – nous y travaillons tous ! – n’hésitons pas à préserver la bouche du cheval pour le travail à la longe.
Par sa pièce de métal placée sur le chanfrein, l’action du caveçon est franche, non-violente, mais ferme. C’est un instrument très fin quand on apprend à s’en servir, et qui inspire suffisamment le respect au cheval : quelques vibrations suffisent pour rappeler à l’ordre un joyeux drille ou un entier un peu expressif. Et pourtant, bien employé, il ne provoque pas douleur, et encore moins de traumatisme.
Oui mais moi je veux longer mon cheval un enrênement !
Mais pas de problème ! Si vous utilisez un enrênement fixé à une embouchure, il suffit de mettre le filet par-dessus le caveçon et de placer l’enrênement comme voulu, tout en continuant de longer sur le caveçon : le travail se fait correctement, et la bouche du cheval ne devient pas le siège d’actions parasites : les effets de l’enrênement ne sont pas conjugués aux effets de la longe. Une action, une réponse.
Au-delà de son emploi au travail, le caveçon est aussi un outil très pratique pour emmener un jeune cheval en extérieur en main, il est alors plus sécurisant que le licol et moins contraignant qu’une embouchure ; mais il est aussi très utile pour gérer un entier « expressif » à pied comme dit plus haut, etc.
Bien utilisé, c’est donc un instrument indispensable qu’on devrait trouver dans toutes les cantines des cavaliers !