Aujourd’hui, les fonds UCITS (Undertakings for Collective Investment Schemes in Transferable Securities) représentent 77% des fonds domicilés en Europe pour un encours d’un peu moins de 6 000 milliards d’euros à la fin du premier semestre 2008. Derrière cette dénomination, se cache une volonté du régulateur de définir une typologie de fonds harmonisée au niveau européen. Ce label, reconnu mondialement offre pour principales caractéristiques un niveau d’informations minimum aux investisseurs finaux, une politique d’investissement stricte (interdiction d’investir dans les hedge funds, respect de critères de liquidités…) et un cadre juridique européen (un fonds UCITS respectera les mêmes règles quel que soit son pays d’immatriculation).Leur création remonte à 1985 (directive OPCVM 85/611/CEE) et le régulateur n’a cessé de faire évoluer leur cadre juridique pour une intégration européenne des OPCVM de plus en plus forte. Malgré la réussite de ces produits, un certain nombre de barrières restent à lever afin de constituer un marché européen unifié. Les principaux écueuils remontés par les acteurs de l’industrie de la gestion d’actifs européenne sont d’avoir un marché européen fragmenté, faiblement rationalisé et perfectible en terme d’information aux investisseurs finaux.
UNE PROFONDE REFORME
- Rationalisation de gamme
Une société de gestion pourra rationnaliser sa gamme, au niveau européen, par la fusion de fonds et la mise en place de fonds maitres/nourriciers européens. - Passeport européen des fonds
Un fonds homologué dans un pays européen pourra être commercialisé dans un autre sous la seule réserve que le fonds obtienne le visa du régulateur du pays hôte dans un délai de 48 heures. - Key Investor Document
L’information des investisseurs sera formalisée au travers d’un document unique à l’ensemble des pays européens. Le KID (Key Investor Document) offrira une information claire, précise et non trompeuse de la nature du produit auquel l’investisseur souhaite souscrire. - Passeport européen des sociétés de gestion
Une société de gestion domiciliée dans un pays européen pourra gérer à distance un fonds autorisé dans un autre Etat membre. Une société de gestion, agréée dans un pays, pourra domicilier ses fonds dans n’importe quel autre pays de la Communauté Européenne.
PLUS UNE OPPORTUNITE QU’UNE CONTRAINTE
Contrairement aux dernières directives européennes (CRD, MiFID et Solvency II), cette révision de la directive OPCVM offre de nombreuses opportunités tant en terme de développement commercial que de rationalisation de coûts pour des besoins en terme d’investissement relativement faibles. Dans son étude, Sia Conseil estime à 600 millions d’euros les économies potentielles pour l’ensemble de l’industrie des fonds français (dont 485 millions pour les 5 premiers acteurs).
L’Europe compte aujourd’hui plus de 30 000 fonds contre 8 000 aux Etats-Unis. L’opportunité offerte par la révision de la directive OPCVM est de procéder à une rationalisation de gamme au niveau européen et non plus local. Une rationalisation doit, en moyenne, amener à une réduction de 20% du nombre de fonds (tout en maintenant les encours stables). L’opération, menée au niveau européen, devra aboutir à la construction d’une gamme resserrée mais tout aussi profonde.
Le marché européen sera désormais assimilé à un marché domestique par l’ensemble des acteurs de la gestion d’actifs. Les politiques de distribution pourront être revues afin d’abaisser les coûts de commercialisation. Les accords de distribution actuellement en place devront être étudiés dans le détail afin de nouer des partenariats au niveau européen et non plus local. Le choix des réseaux, pays par pays, (banque de détail, supermarché de fonds, CGPI, banque privée) devra être mis en perspective avec la rationalisation de gamme opérée.
Aujourd’hui, les établissements possèdent des implantations dans les pays où elles souhaitent être présentes. Cette obligation va tomber et l’opportunité de constituer des hubs pan-européens doit être posée. La spécialisation des sites permet d’augmenter la productivité, d’assurer un meilleur niveau de service et de réduire les coûts d’exploitation. Ces projets organisationnels, qui ont un coût significatif, doivent être étudiés dans le cadre d’une analyse d’impact préalable afin d’identifier les opportunités à en attendre.
UN COUT D’IMPLEMENTATION LIMITE POUR LES GESTIONNAIRES D’ACTIFS
La simplification des démarches de fusion de fonds transfrontalières ainsi que la mise en place de structures « maitre-nourricier » va véritablement lancer les projets de rationalisation de gamme, tant voulus par la profession. Il va être possible d’augmenter l’encours moyen des fonds par une réduction de leur nombre. Ces opérations ne vont pas se faire au détriment de la qualité puisqu’elles vont permettre de regrouper des fonds ayant des stratégies d’investissements identiques en une seule structure juridique. La croissance de la taille des fonds va mécaniquement améliorer leur rentabilité par une diminution des coûts fixes.
La mise en place du passeport européen des fonds va permettre aux sociétés de gestion ayant une politique de distribution transfrontalière de réduire significativement le time-to-market. La demande d’agrément, validée sous 48 heures, permettra de démarrer la commercialisation dans les meilleures conditions en termes de marketing. Il sera par exemple possible de gérer des campagnes de communication dans plusieurs pays sans avoir à redouter la délivrance des agréments. Les démarches, simplifiées à l’extrême, permettront également d’alléger la charge des départements juridiques puisqu’aucune nouvelle information ne sera nécessaire une fois le fonds agréé dans un pays si ce n’est d’envoyer la demande au régulateur local via un dossier électronique.
La mise en place du « Key Information Document » vise à fournir une information claire, précise et non trompeuse aux investisseurs. Une fois le modèle de document validé au niveau européen, les gestionnaires d’actifs pourront diminuer les coûts d’émission de leur prospectus et limiter les coûts d’adaptation dans les pays où le fonds est commercialisé. Cette mesure va permettre de réduire les coûts de publication de l’ensemble des documents d’informations et alléger le travail des services juridiques pour la validation de chaque notice dans les pays où le fonds sera commercialisé.
La réflexion en cours sur le passeport européen des sociétés de gestion est sans doute la réforme la plus structurante pour l’industrie européenne des fonds. Dans les grandes lignes, la révision de la directive vise à autoriser une société de gestion domiciliée dans un pays à domicilier des fonds dans un autre sans avoir à s’y implanter physiquement. Les économies qui peuvent en découler sont à rechercher du côté des plus grands acteurs qui pourraient alors rationnaliser leur organisation mais également du côté des petites sociétés de gestion qui ont ouvert un bureau (Luxembourg et Irlande en tête) et qui deviendrait d’un seul coup inutile. Une réorganisation par centres de compétences, au niveau européen, serait alors tout à fait envisageable. Nous pourrions assister à une concentration du front office sur une place, du middle office sur une autre sans avoir à dupliquer les structures comme cela est actuellement le cas pour certaines sociétés de gestion.
En synthèse, Sia Conseil dresse la cartographie suivante des entités impactées au sein d’une société de gestion suite à la mise en place de la révision de la directive OPCVM.
NE PAS ATTENDRE 2011
La révision de la directive OPCVM est la première réforme règlementaire ne nécessitant aucun investissement imposé. Les grandes sociétés de gestion doivent l’assimiler à une opportunité de développement sans précédent. Cependant, les économies ne deviendront réalité que si les sociétés de gestion mènent des démarches volontaires en amont de la mise en application de la nouvelle directive. Ces démarches peuvent commencer dès aujourd’hui par l’analyse de la gamme de fonds actuellement commercialisée au sein de l’Union Européenne.
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