L’actualité de ces derniers jours est suffisamment riche pour que l’on puisse comprendre les choix éditoriaux des grands organes de presse nationaux. Il faut quand même s’interroger sur le peu de cas qui est fait de la situation dans le département de la Guyane. Ce territoire français est paralysé par un mouvement sans précédent contre la vie chère mené par la plupart des acteurs sociaux du territoire.
Peu de diffusion en radio, quasiment pas en télévision, et pourtant, il s’agit bien d’une partie du territoire national. Je suis partagé. L’actualité ne s’arrête pas à nos frontières, on l’a bien vu encore avec les événements de Bombay ou les affaires de piraterie de l’Océan Indien. Néanmoins, la Guyane est bel et bien française, et l’on ne comprendrait pas que la même situation soit passé sous silence en Corse, en Basse-Normandie ou dans la Creuse. Il y a donc effectivement un problème d’égalité de traitement pour les 200.000 français qui vivent là-bas.
Au coeur de cette histoire, il y a un aspect technique qui nous concerne tous. Vous ne savez surement pas que face à la menace puis à la réalité d’une vague rose aux élections régionales et cantonales de 2004, les gouvernements de Jacques Chirac ont instauré une mesure “préventive” qui ne peut que porter le nom de scélérate… Cette mesure visait à conditionner une bonne part des recettes fiscales et para-fiscales des institutions régionales et départementale à la Taxe Intérieure sur le Produits Pétroliers (TIPP) sur les carburants : elle renvoyait donc largement aux conseils régionaux notamment la responsabilité d’une hausse sur les carburants ; un cadeau important aux acteurs socio-professionnels et aux particuliers, et la politique de la région était et est asphyxiée ; une taxation « normale » ou un peu supérieure à la moyenne, et le gouvernement avait et a beau jeu de dire « Mais vous voyez, la gauche au pouvoir, c’est plus de fiscalité et c’est l’étouffement de l’économie. »
Je n’ai que peu de temps pour développer cet article, mais vous voyez bien qu’à travers un événement tel que cette paralysie de la Guyane peuvent se cacher quelques unes des conséquences d’une politique politicienne revancharde au détriment de l’intérêt général.
Pour en savoir plus,
Une dépêche AFP sur le sujet :
CAYENNE (AFP) — La mobilisation contre les prix des carburants qui paralyse la Guyane n’a pas faibli au huitième jour du conflit, en dépit de l’annonce de la réouverture, prévue mardi matin, de l’aéroport international de Rochambeau, qui était fermé aux vols commerciaux depuis samedi.
Sur le terrain la préfecture a relevé lundi 24 barrages routiers, soit seulement un de moins que la veille.
Les établissements scolaires sont toujours fermés et aucune date n’a été annoncée pour le prochain tir de la fusée Ariane 5, initialement prévu le 10 décembre et reporté sine die.
La décision de rouvrir l’aéroport, prise par la chambre de commerce et d’industrie de la Guyane (CCIG), “fait suite aux propositions du secrétaire d’Etat à l’Outre-mer Yves Jégo et aux avancées qu’elles offrent pour le règlement de ce conflit, mais aussi à l’entrée en négociation des élus avec les représentants de l’Etat depuis ce matin pour tenter de parvenir à un accord”, a déclaré à l’AFP son président, Jean-Paul Le Pelletier.
L’aéroport international rouvrira à partir de 6H00, a-t-il précisé.
Le port de commerce, également fermé, n’a pas encore définitivement rouvert, a poursuivi M. Le Pelletier, mais un pétrolier aura l’autorisation d’accoster mardi “pour approvisionner la centrale EDF”.
Dans un communiqué, le secrétaire d’Etat à l’Outre-mer a aussitôt réagi pour assurer que cette réouverture était “un premier pas encourageant vers le déblocage de la situation qui paralysait ce département depuis une semaine”.
“Je félicite les élus consulaires pour leur grand sens des responsabilités dans une crise devenue extrêmement préjudiciable a l’économie locale”, écrit-il.
Un peu plus tôt, M. Jégo a répété la proposition qu’il avait faite dimanche soir de débloquer 10 millions d’euros sur “le fond exceptionnel d’investissement pour l’outre-mer” si le conseil régional de Guyane acceptait de “baisser de vingt centimes” par litre la taxe qu’il prélève sur les carburants.
“Les élus sont passés sur les barrages et ont indiqué qu’ils s’accordaient un délai de 48 heures pour étudier” cette proposition “et les garanties qu’elle offre ou non”, a déclaré à l’AFP Joël Prévôt-Madère, conseillère régionale et présidente de la Confédération générale des PME de Guyane.
Vendredi, le secrétaire d’Etat avait annoncé avoir obtenu des pétroliers qu’ils consentent à une baisse de 30 centimes par litre de carburant, une mesure répercutée par un arrêté préfectoral pour l’instant sans effet, toutes les stations services étant fermées, à l’exception de trois.
Celles-ci - une à Cayenne, une à Kourou, une à Saint-Laurent du Maroni-, ont été réquisitionnées selon la préfecture pour approvisionner en carburant “principalement le Samu, les pompiers et les forces de l’ordre”.
“La proposition de M. Jégo reste floue. On ne sait pas sur quelle ligne budgétaire seront débloqués ces 10 millions”, a par ailleurs déclaré à l’AFP Raymond Liabaste, président de l’association des consommateurs en colère, une des structures à l’origine du mouvement de protestation.
“Les élus sont échaudés par des subventions promises par le passé, qui ne sont pas arrivées suite à un remaniement ministériel”, a-t-il ajouté.
Les manifestants, regroupant à la fois des militants associatifs, des représentants de syndicats professionnels soutenus par de nombreux élus locaux, réclament une baisse de 50 centimes sur le prix à la pompe.
Sur la Taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP)
Loi n°2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d’insertion et créant un revenu minimum d’activité, JO du 19 décembre 2003.
Loi n° 2004-809 du 13 août 2004 modifiée relative aux libertés et responsabilités locales, JO du 17 août 2004.