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Faut-il se risquer à la professionnalisation pour un club de rugby?
Publié le 01 décembre 2008 par Guilloubo
Avec la professionnalisation du rugby français, les clubs de Fédérale 1 ont vu se creuser l’écart entre le monde professionnel et le monde amateur. Les clubs qui ont eu des expériences en pro D2 ou en Top 14 en ont pour la plupart fait les frais. La saison 2007/2008, a permis la montée de Blagnac en Pro D2, mais elle a été un échec sportif. Le club n’a pas réussi à bien entrer dans sa saison et s’est trouvé très rapidement distancé au classement général. Or, pour réussir dans ces championnats 100% professionnel, très difficiles, il faut arriver à s’accrocher dès le début pour partir sur une dynamique de victoires et obtenir le maximum de points de bonus défensifs ou offensifs. Si on met de côté l’écart sportif entre les divisions professionnelles et amateurs, il faut avant tout arriver à boucler son budget. En plus des résultats décevants, Blagnac, après une belle saison en Fédérale 1, s’est vu rétrogradé en Fédérale 2 pour budget non équilibré. En fin de saison de PRO D2, Blagnac avait accumulé un trou de 500 000 €. La sanction est donc immédiate, c’est la rétrogradation en division inférieure. Comme quelques clubs français, Blagnac a eu une malheureuse expérience du professionnalisme.
L’écart se creuse
D’autres clubs ont envisagé la montée en PRO D2, comme Valence-d’Agen qui s’est vite rendu compte du fossé existant au passage d’un club amateur à un club professionnel. En fédérale 1, l’encadrement reste en majorité composé de bénévoles. Ceux qui font que le club tourne bien, et qui ne coutent quasiment rien. Pourtant les choses évoluent à la demande de la fédération française de rugby. D’ici quelques années, et déjà pour la Fédérale 1, les clubs doivent se professionnaliser, pour pouvoir se préparer à l’éventualité de la montée. Je ne parle pas des salaires de joueurs, mais surtout du staff technique. Car aujourd’hui, de nombreux clubs de Fédérale 1 ou Fédérale 2 emploient des joueurs dit "professionnels". Mais ce que l’on observe de plus en plus c’est toute la structure du club qui évolue vers ce stade.
Le club de Valence-d’Agen avait estimé une hausse de 5 fois son budget pour commencer à réfléchir pour une éventuelle montée en PRO D2. En Fédérale 1, il y a 6 poules de 8 équipes, qui sont plus ou regroupées par région entre Nord et Sud. Si les équipes du Sud constituent les montées en PRO D2, l’écart se réduit de saison en saison. Dans le Sud, on constate que ce sont des "petites" villes en majorité qui constituent les poules ( Le Bugue le Buisson, Morlaas, Oloron..), alors que dans les poules du Nord ce sont, en général, des villes de plus grandes envergure ( Lille, Rouen, Massy, Chalon, Vannes, Orléans…). Comment des petites villes voir des grands villages peuvent-ils prétendre à la professionnalisation. Sur quelle base budgétaire, sur quels fonds ? Il est vrai que dans le sud le vivier de joueur est encore bien supérieur à celui du nord, ce qui permet aux clubs du sud de pouvoir encore batailler. Un échec en division supérieure peut avoir de grosses conséquences sur le tissu économique local. La montée est toujours euphorique, mais plus dure en est la chute. Faut-il déjà penser à des regroupements de clubs pour constituer une vraie force active du rugby ? La solution passera certainement par ce cap, mais les clubs de rugby et leur histoire propres pourront-ils faire place à de nouvelles structures sportives?
Un Budget, oui mais combien?
Depuis quelques années, l’équipe d’Auch fait l’ascenseur entre la Pro D2 et le Top 14 et aujourd’hui, les difficultés financières que rencontre le club auscitain pourraient faire rétrograder l’équipe en fédérale 1 pour budget non bouclé. Pour réussir en fédérale 1 et plus encore en Pro D2, il faut compter dans ses rangs un bon pack (d’avant) et un excellent buteur, et naturellement avoir un budget adapté à ses ambitions. Recrutement des joueurs, parfois même embaucher des permanents technique au sein du club. Le club montalbanais a du embauché 3 personnes, lors de la montée en Top 14, ce qui a plombé ses finances. Ce sont ces petits détails qui font la différence avec les gros clubs. L’exemple de Toulouse avec un budget de plus de 22 millions d’€ (1er de tous les clubs), le personnel technique et administratif, du club a été multiplié par dix. Avec son budget de 9,5 millions d’€ (12e de tous les clubs), Montauban sait que la bataille sera rude non seulement sur les terrains mais également dans les structures du club. Il est très rare dans le milieu amateur, de voir des clubs qui arrivent à dépasser le million d’euros de budget. C’est là que se crée le fossé entre le monde professionnel et amateur.
Se désister pour la montée
L’écart qui existe entre le monde professionnel et amateur, semble refroidir de nombreux clubs de Fédérale 1. Après 10 ans d’expérience de Ligue Nationale de Rugby, certains clubs de rugby hésitent à prendre le pari fou d’une montée professionnelle. Blagnac qui avait relevé le challenge a subi le contre coup de la descente avec des gros problèmes de gestion qui pourraient calmer les ardeurs de certains dirigeants. Le cap professionnel n’est pas en soit très difficile à obtenir, mais il faut pouvoir le maintenir. Certains clubs devraient même à terme refuser leur montée et rester en Fédérale 1, division mieux adaptée à leur budget. Le rugby français demande aujourd’hui de plus en plus de moyens financiers que de nombreux clubs "amateurs" ne peuvent faire face. D’ici quelques années, le paysage du rugby français devrait migrer vers le nord, ou les budgets auront plus de chance d’être bouclés.