Voilà un peu le sentiment qui m’anime ce soir après avoir entendu la conférence de presse que le Conseil d’Etat a consacrée à la votation populaire sur le nouveau Musée des beaux-arts à Bellerive. Un projet refusé par 52,4 % des votants.
Un étrange sentiment que le péril bétonné, semi-privatisé, mal implanté, pas intégré n’a pas dit son dernier mot. L’ombre plane … et pourrait bien refaire surface là où on s’y attend le moins, c’est-à-dire là où il a coulé : à Bellerive.
C’est en tout cas ce qui se dégage des propos de la Ministre de la Culture Anne-Catherine Lyon qui a affirmé que le Conseil d’Etat allait remettre l’ouvrage sur le métier en y travaillant d’arrache-pied et qu’aucune solution n’était à écarter, y compris au bord du lac à Bellerive !
Son argument massue : les communes des bords du Léman ont été celles qui ont le plus accepté - plutôt le moins refusé - le projet gouvernemental. Le slogan «pas au bord du lac» est donc caduc. Une étrange argumentation quand on sait que les lausannois, parmi les principaux intéressés, ont refusé le bunker – malgré un appui massif de leur Municipalité – et que les électeurs des bords des lacs de Joux et de Neuchâtel ont boudé le projet.
Lac pour lac …
On voudrait nous préparer à accepter un projet «blanc bonnet, bonnet blanc» dans un futur proche que l’on ne s’y prendrait pas autrement.
Soyons clairs, personnellement, je ne considère pas comme une grande victoire le fait d’avoir contribué à torpiller l’entreprise mal née de musée de beaux-arts AU bord du lac, même si c’est face à la mobilisation massive de tout ce qui compte dans le canton.
Par contre, j’ose espérer que cela fera un peu réfléchir le Conseil d’Etat et la Municipalité de Lausanne pour qui cette votation populaire n’a l’air d’être qu’une petite anicroche sur le chemin de sa volonté triomphante.
Une volonté triomphante soulignée par la Municipale Silvia Zamora qui affirme haut et fort que l’avenir de la place de la Riponne et du Romandie est déjà scellé par ses soins : ce sera le nouveau haut lieu culturel de la jeunesse. Voilà une manière un peu cavalière de bétonner (!) un avenir que les Vaudois et les Lausannois veulent, comme semble le montrer leur vote, un peu différent de ce qui leur est proposé.
S’il est vrai que le «non» est vraisemblablement le résultat d’une addition d’opinions différentes, il est au moins aussi vrai que le «oui» est probablement le résultat d’une conjonction d’avis disparates allant des acteurs de la culture à ceux de l’économie en passant par l’écrasante majorité des politiques. Avec une telle armada, un petit «non» devrait quand même faire grandement réfléchir et inciter le gouvernement à songer à une alternative un peu plus crédible qu’un «Bellerive bis».
Pour terminer ce billet, je ne saurais résister au plaisir de rapporter, en substance, les propos du Conseiller d’Etat François Marthaler, l’un des nombreux papas du m2, qui a trouvé le moyen de se remonter le moral en affirmant que Bellerive est devenu le centre ville de Lausanne grâce au métro automatique qui emmène plus de passagers vers le lac que vers le CHUV. Comme si ces passagers, une fois arrivés au bord du lac, ne rebroussaient jamais chemin et finissaient, engloutis à jamais, au fond du lac, comme le fantasmatique musée des beaux-arts À Bellerive.