Les hôtels de luxe, en particulier en Asie, sont devenus une cible privilégiée des attentats islamistes et la sécurité doit y être fortement renforcée, ont indiqué des experts après une prise d'otages sanglante dans deux hôtels de Bombay mercredi soir.
Un groupe se faisant appeler "les Moujahidine du Deccan" (plateau central et méridional de l'Inde, ndlr) a revendiqué des attaques qui ont notamment visé l'hôtel Oberoi Trident et le prestigieux palace Taj Mahal.
"Nous constatons qu'il y a maintenant une tendance mondiale à attaquer les hôtels occidentaux. La menace à l'encontre de ces hôtels s'est accrue de manière significative", a déclaré Rohan Gunaratna, directeur du Centre international de recherche sur la violence politique et le terrorisme à Singapour.
Même si le Taj Mahal et l'Oberoi appartiennent à des groupes indiens, des témoins ont indiqué que les attaquants islamistes à Bombay y avaient choisi spécifiquement des Britanniques et Américains comme otages.
Plusieurs attaques récentes dans la région ont visé des hôtels appartenant à des chaînes occidentales ou hébergeant un grand nombre d'étrangers.
Le 20 septembre, un attentat au camion piégé contre l'hôtel Mariott d'Islamabad faisait au moins 60 morts. Auparavant, en janvier, huit personnes avaient été tuées à Kaboul dans l'attaque du grand hôtel Serena.
En 2005, en Jordanie, ce sont les hôtels Radisson SAS, Grand Hyatt et Days Inn qui avaient été visés par des attentats suicide à Amman. En 2003, c'était le JW Mariott de Jakarta en Indonésie qui était touché par l'explosion d'une bombe, faisant 12 morts.
"Je pense qu'il s'agit vraiment d'une attaque contre l'Occident", a confirmé Nick O'Brien, un professeur associé de l'Université Charles Sturt à Canberra, spécialiste de la lutte anti-terroriste.
Pour M. Gunaratna, comme la sécurité des résidences et missions diplomatiques occidentales a été renforcée pour prévenir des explosions ou assauts armés, les attaquants se tournent vers les hôtels qui sont comme "des deuxièmes ambassades".
Les attaques de Bombay montrent que tous les hôtels occidentaux dans des pays comme l'Inde, dans la ligne de mire du terrorisme, doivent améliorer ou au moins revoir leurs systèmes de protection, a estimé M. O'Brien.
Plusieurs analystes ont donné en exemple l'Indonésie qui a fait la preuve qu'améliorer la sécurité donnait des résultats.
Depuis l'attaque du Mariott et d'autres attentats à Jakarta, les hôtels, bureaux et autres cibles potentielles sont munis de portiques détecteurs de métaux, de vigiles et d'équipements pour inspecter les véhicules.
Plusieurs hôtels ont mis en place des barrières ou rampes spéciales pour empêcher l'intrusion d'une voiture ou d'un camion dans leur hall d'entrée.
Cette politique "est devenue un moyen de dissuasion en Indonésie", a confirmé Sidney Jones, une responsable à Jakarta du groupe de recherche International Crisis Group.
L'experte a souligné que les attentats de 2005 sur l'île de Bali, ayant fait 23 morts, n'avaient justement pas visé les hôtels, trop bien protégés, mais des restaurants et bars en plein air.
Pour M. Gunaratna, des pays comme l'Inde et le Pakistan où le risque d'attentats est élevé, devraient poster des gardes armés à l'entrée de tous les hôtels internationaux. Il faudrait également renforcer la coordination entre ces établissements et les forces de sécurité gouvernementales.
La meilleure défense c'est la distance, a estimé M. O'Brien, en recommandant l'instauration de larges périmètres de sécurité autour des hôtels, même s'il a reconnu qu'assurer une protection "totale est très très difficile" face à des assaillants très bien entraînés et préparés à mourir.
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