A en croire les autres, il semblerait que les plus grandes vertus de Facebook soient celles de nous permettre de retrouver des amis perdus de l'époque où nous étions encore "tout amour" et où nous ne connaissions point les affres de la vie d'adulte. Genre, à l'époque de l'adolescence.
Maintenant que nous savons que la vie n'est pas le pays des Minipouss et après avoir ravalé nos rancunes post-acnéiques (les gouailles sur un éventuel appareil dentaire, les quolibets sur les vêtements exclusivement choisis par quelqu'un qui ne nous veut pas que du bien, les persiflages des cours de récré ou celles de la cantine qui nous tenaient à l'écart des gamins les plus populaires, etc., à chacun sa croix), on est prêt à pardonner à ceux qui nous ont offensés. Amen.
Et donc, une fois tous ces êtres de lumière retrouvés et acceptés dans nos "Friends", vient en général le premier contact post-guerre des boutons. On ne s'est pas vus depuis plusieurs années, alors il faut faire bonne impression, lui en mettre plein la vue. D'abord timidement, on lui demande, où c'est l'inverse, ce qu'il est devenu "depuis le temps". On n'écrit que les bonnes choses et s'il y en a des mauvaises, on les insère subrepticement dans la "conversation" en y mettant des petits smileys façon "ahhh c'te blague"... Ni vu, ni connu, je t'embrouille.
S'ensuivent quelques "Inbox" du même acabit, chacun parle de soi, de temps à autre, on s'intéresse à l'autre en lui posant une question, 'ttends c'est un pote d'enfance totalement disparu de ta vie et dont tu avais presque totalement oublié l'existence, c'est jour de fête.
Il y a ensuite l'échange d'emails, le vrai de vrai, le privé, celui réservé aux amis actuels.
Ca y est, le répertoire d'adresses vient d'être updaté, il fait partie des amis qui sont dignes de recevoir toute la flopée de gags et histoires drôles reçus de nos autres amis, qui les ont reçus de la part d'autres amis et ainsi de suite. A la fin de la semaine, tout ce petit monde les as reçus au moins deux fois, c'est la magie de l'Internet, dans la joie et la bonne humeur.
Vient enfin le moment fatidique où il faut se rencontrer IRL (in real life). Un peu comme avec Meetic.
Comme on ne sait pas si l'autre ne va ne pas nous tendre les golfs au bout de 5 minutes et vice versa, on accepte/propose "de boire l'apéro". Petite suggestion : à la fin de la journée, en quittant vos collègues pour aller à votre date, lancez innocemment la bouche en cœur "je vais prendre l'apéro avec un ami d'enfance" (vous n'allez quand pas leur dire que vous allez boire un verre avec celui ou celle qui fut la star de l'école et qui vous a fait mener une vie infernale dont 15 ans de thérapie n'en sont pas venus à bout, non ?), ils en seront jaloux.
Ambiance garantie le lendemain à la coffee machine, c'est vous qui allez être la star de la pause café, parce que vous aurez teeeeeeeeeeeeeeellement de choses intéressantes, c'est ce qu'ils croiront, à raconter à propos de votre "ami d'enfance". Ou pas.
Parce que suite à cette soirée, il y aura deux cas de figure, soit l'apéro se passe merveilleusement bien et vous devenez les meilleurs amis du monde et continuez de vous voir très souvent, tant mieux pour vous.
Ou alors, l'apéro a traîné en longueur, vous vous êtes fait chier comme un rat mort à écouter l'autre vous raconter sa vie de dépressif (lui, sa thérapie est venue après) et au moment de se quitter, vous vous êtes promis mutuellement de vous revoir très bientôt "on s'appelle et on se fait une bouffe" en prétextant mutuellement ensuite un agenda overbooked jusqu'à juin 2012, 'ttendez, vous en avez des potes sur Facebook et continuerez à envoyer/recevoir des gags et histoires drôles à/de l'autre, histoire d'entretenir cette belle amitié. Et peut être qu'un jour, je vous raconterai pourquoi une de mes anciennes collègues n'a pas voulu accepter être dans mes "Friends" parce qu'elle m'en veut encore et toujours pour une sombre histoire de saucisses viennoises et de yaourt.