Plans de sauvetage: folie furieuse à Washington

Publié le 27 novembre 2008 par Objectifliberte

Incompréhensible, délirant... Alors que Henry Paulson avait fort judicieusement suspendu l'application du volet "rachat d'obligations pourries" de son plan, ouvrant la voie à une possible purge des obligations pourries détenues par les institution financières (cf. ma note de mardi ), la FED vient d'annoncer un investissement massif de 700 milliards de dollars dans le rachat de MBS garanties par Fannie Mae et Freddie Mac.

Autrement dit, les opérations de rachat spéculatifs de MBS sont à nouveau gelées, puisque la FED, qui peut imprimer sa propre monnaie, se met sur le marché. En outre, l'état créancier (via la FED) risque d'introduire des considérations politiques, et pas seulement économiques, dans la solution des problèmes de crédit à la source de la crise: l'état pourrait faire pression sur la FED pour abandonner plus de créances que nécessaire à des fins démagogiques. Le mythe de l'indépendance de la FED pourrait voler en éclat. Cela rendra plus difficile la liquidation des MBS prêt par prêt, retardant la purge du marché immobilier des 3000 milliards de survaleurs artificielles qui y ont été créées entre 2000 et 2007.

Et financièrement, où cela nous mène-t-il ? Calculons la somme des "sauvetages" entrepris par la puissance publique américaine:

Nationalisation de Fannie et Freddie, et rachats de MBS par la FED: coût estimé, 300+700 Mds USD
Plan paulson : 700 Mds USD (le rachat de titres a été gelé, mais l'argent n'a pas été rendu...)
Déficit de l'état fédéral avant la crise: 450 Mds

Auquel il faudra ajouter le "plan de relance" promis par Obama, qui culminerait désormais à 700 Mds...

Soit un total de environ 2800 Mds USD principalement financés par déficits, essentiellement sur un an, le tout sans compter une base fiscale en forte contraction, récession oblige, ni le probable arrosage des constructeurs automobile.

Cela représente environ 1/5 du PIB américain, 20% du PIB de déficit, ou encore... 100% du budget fédéral, ou 66% de la somme des budgets publics aux USA !! Si la planche à billets n'est pas abusivement sollicitée, il faudra emprunter brutalement des sommes considérables pour financer un accroissement aussi brutal des déficits.

Si l'on ajoute à cela tous les plans de relance Européens et le plan Chinois, la demande des états pour des capitaux frais va exploser, ce qui aura un double effet mortel: d'une part, ces capitaux seront moins disponibles pour s'investir directement sous forme de crédit ou de capital dans les entreprises, d'autre part, les taux d'intérêts à long terme demandés aux états vont fortement augmenter.

Et donc, le taux d'intérêt consenti aux autres acteurs de l'économie (entreprises, ménages), va exploser lui aussi : la récession, qui aurait pu être limitée sans ces interventions inconsidérées, n'en sera que plus dure.

Enfin, les états qui inspirent le moins confiance (comme ceux dont le secteur financier, trop financé par la dette, menace de s'écrouler) risquent la cessation de paiement, faute de pouvoir emprunter, tant la compétition entre emrpunteurs pour s'arracher les capitaux disponibles sera rude. Reste à savoir quels états tomberont en premier... Les scénarios de faillite d'états, déjà évoqués ici, sont plus que jamais d'actualité.

Si Washington ne revient pas à un peu de sagesse financière, les conséquences seront dévastatrices, et ce au plan mondial, et ce dès 2009. Seule des politiques de coupes drastiques dans les dépenses publiques, et conjointement, de réduction des impôts frappant la formation de capital, peuvent sortir les économies de l'ornière actuelle.

Angela Merkel a bien raison de fustiger ces plans de relance en "monnaie de singe" comme le rapporte le Financial Times de ce matin:

"Excessively cheap money in the US was a driver of today’s crisis,” she told the German parliament. “I am deeply concerned about whether we are now reinforcing this trend through measures being adopted in the US and elsewhere and whether we could find ourselves in five years facing the exact same crisis."

Et le premier ministre Polonais, Donald Tusk, d'ajouter, perfidement ou malicieusement:

"La principale question est de savoir où trouver l'argent. Moi aussi, je pourrais clamer que je vais mettre des milliards, et ajouter tout bas “si j'arrive à les emprunter” !"

Malheureusement, ces lueurs de sagesse sont tournées en dérision par une presse et une majorité d'analystes qui réclament a cor et à cri de vastes "plans de relance" publics.

La crise, fille de politiques publiques ineptes, va être considérablement amplifiée par des réactions tout aussi inconséquentes de nombreux états. Et naturellement, le capitalisme, les marchés, seront accusés du marasme. Espérons seulement que la crise ne provoque pas a foison des "révolutions" autoritaires ou des conflits majeurs.

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