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Plus blanc que blanc

Publié le 27 novembre 2008 par Uscan
Comme si l'on me prenait pas la main pour me faire visiter mon monde avant de m'en extraire, je traverse ces jours-ci différents lieux au sein desquels je n'ai rien à faire. Me voilà ainsi attablé à la cafétéria d'un hôpital, en face de l'entrée principale, au croisement de trois couloirs.

Mon esprit hésite entre le récit du livre que je trimbale partout avec moi et celui de l'espace qui m'accueille. Toutes les trois pages mon regard se relève et observe avec avidité les aller et venues, les attitudes, le mobilier, son agencement, les services... l'esprit que dissimule ce lieu. Qui est-t-il ?

Le calme qui m'habite à cet instant aide mon esprit à ressentir ce que pourrait être un lieu de guérison pour les hommes, sur quelles valeurs il pourrait être fondé, et quelle ambiance il exhalerait alors. Le hiatus, encore lui, avec l'univers concret qui m'entoure n'en apparaît que plus béant.
La première chose que j'ai remarqué en abordant le cafétéria ce sont les produits inscrits au menu : plats préparés bourrés d'additifs chimiques pour four à micro-ondes, madeleines sous plastique, pain industriel, viennoiseries insipides (j'ai testé !). Parcourant quelques mètres pour m'attabler je remarque les rampes de néon qui projettent une lumière acre sur les clients, et je me rappelle ce que savent les gens qui travaillent sur l'aura humaine, et notamment que ce type de lumière agresse et perturbe notre champ énergétique. La froideur du lieu et de son arrangement entrent en moi : les couloirs rectilignes, les motifs parallèles et orthogonaux, plus loin, derrière une baie vitrée, l'effrayante dépersonnalisation du laboratoire où l'espace semble davantage dévolu aux machines et aux automates qu'à l'humain... Cet espace me rappelle les « salles blanches » des sous-sols techniques des chaînes de télévision, où sont rassemblés les gigantesques serveurs vidéo, et où l'on maintient toujours une légère surpression pour faciliter l'évacuation naturelle des poussières et protéger les ordinateurs. Lorsqu'il m'arrive de devoir traverser ces lieux, pour redémarrer ma machine de montage, par exemple, je ressens toujours l'atmosphère extrêmement hostile, comme si l'on aspirait avec une grande force l'énergie de mon corps, comme si l'on soutirait de moi la chaleur animale, mes viscères se contractent imperceptiblement et mon âme semble se fermer comme pour se protéger.

L'hôpital veut ignorer que l'homme est un tout, que le corps et l'esprit sont le même phénomène, et que le « corps énergétique » est un pont, une continuité entre ces deux aspects, dont on connait aujourd'hui de façon rigoureuse les grands principes. A mes yeux, tout dans la chair de cet hôpital transpire ce refoulement. L'isolement des individus qui défilent ici comme ils défilent dans le métro sonne comme une confirmation. Le panneau « PointInfos : LES INFECTIONS NOSOCOMIALES » saute au visage juste derrière la porte du hall d'entrée, comme un aveu, presque un lapsus.

Centre de santé, l'hôpital pourrait être un lieu de rencontre et d'échange entre les divers acteurs de la santé humaine. Les médecins allopathes, évidemment, tant la discipline nous a apporté ; mais les guérisseurs traditionnels, les magnétiseurs, les connaisseurs de l'EFT, les praticiens de la résonance quantique, de l'Ayurveda ou de la bioélectronique de Vincent, les connaisseurs des cristaux, ceux qui étudient les propriétés subtiles de l'eau, la structure électromagnétique du corps humain, les méridiens, les plantes ou les huiles essentielles, toutes les traditions chamaniques... Il existe une galaxie de médecines parfois très efficaces. Toutes, sauf la nôtre, impliquent l'être entier et guérissent de concert le corps et l'esprit. Les moyens qui permettraient la rencontre et l'approfondissement de tous ces savoirs humains sont aujourd'hui à notre disposition. Les hôpitaux pourraient être des centres de guérison où foisonnerait la diversité des méthodes, où l'on organiserait leur complémentarité ; des lieux de curiosité et d'ouverture plutôt que des usines, des lieux de paix et d'élévation, des espaces d'écoute et d'amour plutôt que des centres de profit.

Dans le regard du médecin qui passe à l'instant dans le couloir, dans la suffisance de sa gestuelle, dans la crispation hautaine de sa mâchoire, je lis une réponse. Dans le ton speedé de la quinquagénaire pimpante installée juste derrière moi, dans sa façon de dire « Oui, bonjour, laboratoire machin, je voudrais le secrétariat de la gastro-entérologie, c'est urgent, s'il vous plait, merci », il y a sans doute un mobile.


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