« Toute personne a le droit de se marier et de fonder une famille sans aucune restriction quant à la race, la nationalité ou la religion. Le mariage ne peut être conclu qu’avec le libre et plein consentement des futurs époux. » Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Article 16.
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A l'occasion de la journée internationale contre les violences faites aux femmes, il est normal et même urgent de parler, une fois de plus, du mariage forcé, pour rappeler que même dans le pays de la liberté et de l’égalité, des femmes sont encore vendues, souvent sous le manteau. Parce qu’une fille n'existe réellement dans le regard de son père qu'en servante de la maison, prisonnière de sa chambre, et paquet-cadeau enrobé de virginité pour l'homme qu'il aura choisi.
Quand parle-t-on de mariage forcé ?
Le mariage forcé est un terme utilisé pour décrire un mariage dans lequel une des parties (le plus souvent la femme) ou les deux, est marié contre son gré. Ce type de mariage est différent du mariage arrangé, dans lequel les deux parties consentent à être assistés de leurs parents ou d'une troisième partie pour trouver un(e) époux (épouse). La culture occidentale et l’ONU considèrent le mariage forcé comme une atteinte aux droits de l’homme par violation du principe de liberté.
Très commun dans les classes aisées européennes jusqu'à la fin du XIIe siècle, le mariage forcé reste une pratique courante en Asie, au Moyen-Orient, en Afrique et en Europe de l'Est.
Comment ça se passe ?
Ce mariage se fait sous la contrainte. Ce sont les parents ou un membre de la famille qui choisissent le futur conjoint (que la fille peut ne pas connaître) et qui organisent le mariage. Le mariage est souvent organisé soit sans que les jeunes femmes n’aient été tenues au courant, soit qu’elles en étaient averties et tenté de contester sans que la famille en tienne compte.
Conséquences - Répercussions physiques :
- Violences physiques :
Ces femmes sont souvent battues par les membres de leur famille (père, mère, frères) pour les forcer à subir un mariage. Après mariage, c’est le mari et sa famille qui prennent le relais.
- Dépression :
Fréquente dans le cadre du mariage forcé, peut aller jusqu’au suicide.
- Répercussions psychologiques et sociales:
Le mariage forcé est vécu avant tout comme un viol. Ceci peut entraîner une perte de la confiance en soi et envers les autres, détruisant l’identité de la personne ainsi que ses repères affectifs.
- Le risque de conflits familiaux est fréquent avec une rupture avec la famille et l’entourage, pouvant aggraver une dépression.
- Le mariage forcé est vécu comme une trahison de la confiance dans ses propres parents. Le jeune fille finit par se replier autour de « son lourd secret », ce qui explique que beaucoup de mariages forcés ne sont pas dénoncés.
- La personne concernée est souvent tiraillée entre la révolte et la crainte de trahir les espoirs de la famille.
Le mariage forcé et la loi:
Même si dans le Code civil français, aucun article ne parle de mariage célébré sous la contrainte, il s’agit d’une pratique illégale puisque dans ce cas, le consentement des jeunes femmes n’est pas respecté. Mais, même en France, la loi ne suffit pas à protéger ce droit puisque la plupart de ces mariages restent encore sous le silence.
Et les femmes « complices » ?
Les femmes qui participent à ces agissements qui, au delà de l'aspect culturel, doivent être qualifiés « inhumains », témoignent du lavage du cerveau qu’elles ont subit depuis leur naissance, de la soumission à une société fermée au sein de laquelle elles n’ont qu’une place, celle de l’esclave. Très souvent elles n’ont pas d’autre choix que se plier aux ordres des mâles de leur famille, et celles qui tentent de s’écarter des chemins tracés sont souvent violentées, parfois exclues du clan social. L’épouse doit obéir à son mari, la fille à son père et à ses frères, parfois la mère à ses fils, et ainsi de suite, dans une boucle fermée qui les retient prisonnières.
Culture ou barbarie ?
Dans de nombreuses sociétés le mariage forcé est encore considéré comme une pratique culturelle faisant partie d’une structure sociale qui a peu ou pas changé depuis des siècles. Même s’il est important de ne pas rejeter les coutumes et la culture des autres juste parce qu’elles sont différentes, cette pratique constitue avant tout une violation des droits de l’homme.
Agir:
Information- Education:
Avant tout il est primordial de rappeler aux filles et aux garçons qu’ils ont des droits égaux, que toute relation entre deux personnes doit être basée sur le principe du respect, de l’égalité et de la liberté de consentement.
La pratique du mariage forcé est plus fréquente dans les milieux défavorisés, à bas niveau socioculturel et économique. Une approche éducative s’avère donc indispensable, aussi bien auprès des jeunes des deux sexes que des adultes.
Parlez-en:
Le silence est un ver qui ronge insidieusement. Il ne faut pas garder à cette pratique, entre autres, l’aura du tabou qui l’enveloppe. Aborder le sujet du mariage forcé à l’école est indispensable, tout comme celui du tabagisme, de l’alcoolisme. Ceci permet d’ouvrir le débat et d’encourager filles et garçons à comprendre la réelle problématique de telles pratiques, d’en parler plus librement. Pourquoi ne pas organiser des projections sur ces sujets « sensibles », afin d’ouvrir le débat ? Osez en parler, vous-même ou par l’intermédiaire d’une personne de confiance : proche, amie, éducateur, professeur, assistante sociale, etc.
Plus d’informations sur le site : www.mariageforce.fr
Dénoncer cette pratique n’est en aucun cas une remise en question de la confiance ou du respect des auteurs de cette pratique, mais un droit de la personne à choisir en toute liberté.
Déceler les signes d’appel:
Savoir poser des questions devant un changement inexpliqué de comportement, une tendance à l’isolement, l’apparition ou l’exacerbation d’une addiction préexistante.
Encourager au dialogue dans une atmosphère basée sur l’échange et la confiance.
Prendre en charge:
Une prise en charge psychologique et matérielle est indispensable pour permettre à ces femmes de retrouver une vie « normale ».
Un droit inviolable:
Une fois de plus nous sommes devant un drame vivant qui nous replonge dans le calvaire raconté par Zana Muhsen, Betty Mahmoody et toutes ces femmes qui, au-delà des frontières et des religions, souffrent en silence de l’injustice d’une société tribale étouffant dans le berceau leur identité, leur liberté, leur droit de choisir.
Remerciements particuliers à TSR Consulting pour sa contribution à l'étude de l'aspect culturel de cette pratique.